La vie devenait de plus en plus dure dans le pays des singes, les golos. Depuis longtemps, il n'avait pas plu et il n y avait plus d'épis de mil ou de maïs à voler dans les champs ; les melons et pastèques ne poussaient plus ; même les racines de nénuphar avaient disparu du lit séché des marigots. C'était la sécheresse, c'était la famine.
Le chef réunit son peuple pour trouver une solution et sortir de cette crise. Il promit d'aller lui même repérer un autre pays où son peuple pourrait trouver à manger et à boire.
Le lendemain, avant le lever du jour, il se mit en route. Il marcha un jour ; il marcha une semaine. Au bout d'un mois, il arriva dans un endroit qui ressemblait à un coin de paradis. L'eau coulait à fot ; les arbres fruitiers
étaient nombreux ; on voyait des champs de mil et de maïs, des pastèques à perte de vue. Le chef mangea d'abord à sa faim, puis se posa sur la branche d'un arbre pour mieux observer ce lieu magique. Avant de repartir,il vit une scène qui l'inquièta, mais il se dépêcha de rentrer pour annoncer la bonne nouvelle à son peuple.
Dès son retour, il leur dit :
- J'ai trouvé un endroit où la nourriture et l'eau sont abondants, un endroit agréable, mais j'ai vu là-bas une scène inquiétante.
- Quelle est cette scène ? demandèrent les autres en chœur.
- L'endroit n'est pas loin d'un village de paysans, et j'ai vu une flle qui pilait le mil avec un pilon et un mortier. Autour d'elle sautillaient des chèvres et des brebis. Le fls du chef de ce village jouait avec ces bêtes. Les bêtes voulaient manger le mil ; alors la flle s'est mise à les chasser avec son pilon !
- Mais qu'est ce que cela a à voir avec nous ? dirent les autres. Ce qui nous importe, c'est d'avoir à manger et à boire, c'est tout. On y part dès demain.
Ils arrivèrent sur les lieux, s'y installèrent et vécurent fort bien pendant plusieurs mois.
Un jour, en voulant chasser une chèvre avec son pilon, la flle la manqua et cassa la tête du fls du chef du village. Le chef, son père, réunit tous les guérisseurs pour le sauver. Ils exigèrent une grosse quantité de cervelle de singe pour le guérir.
Alors, en quelques heures, les garçons du village attrapèrent tous les singes et les attachèrent aux arbres, les pieds et les fesses en l'air et la tête qui pendait en bas. Les singes se tournèrent alors vers leur chef pour lui demander un conseil. Ce dernier leur dit :
- Vous ne m'avez pas écouté quand j'avais la tête en haut, sur mes épaules ! Que dire maintenant que j'ai la tête en bas et les fesses en l'air ?
Ce conte est fni ; le premier qui respire ira au Paradis.
FIN