Cela devait faire trois jours qu'Hinata cherchait désespérément ses compagnons sous la pluie battante. Tout son corps était lourd et douloureux. Son Byakugan, le pouvoir ancestral de sa famille, lui était inutilisable. Le brouillard violacé qui s'était propagé, peu après leur arrivée, en était sûrement pour quelque chose. Seulement, ils n'avaient eu le temps de s'appesantir sur le sujet qu'ils s'étaient retrouvés séparés les uns des autres.
Ce qu'Hinata ne savait pas c'était que ces trois jours, où elle se croyait sous une averse, elle était dans un coma profond dans l'hôpital de Konoha, sous les soins minutieux de l'Hokage en personne.
De fait, elle ne réalisait pas qu'elle revivait les heures précédant ces affreuses nuits. Aussi, quand elle s'effondra de fatigue dans son inconscient, son rythme cardiaque s'affaiblissait, dans la vraie vie, alarmant ainsi les infirmières.
N'ayant plus aucune notion du temps, Hinata se réveilla dans une pièce qu'elle n'avait encore jamais vu. Le lit miteux dans lequel on l'avait couchée faisait face à une vielle cheminée éteinte où avait élu domicile quelques araignées. Tout son corps lui hurlait de ne faire aucun mouvement, mais elle s'obstina. Essayant de se lever, Hinata remarqua les chaînes qui la maintenait en étoile de mer sur ce lit.
Elle tira longtemps sur ces liens, en vain. La fatigue l'emporta rapidement et elle s'endormit quelques instants plus tard.
Seulement, elle fut tiré du sommeil brutalement. Peu de temps après s'être endormie, elle sentit une main empoigner sa gorge. La pression était si forte qu'elle ne pouvait plus respirer. Incapable de repousser l'homme, à cause de ses bras attachés à des chaînes, Hinata assista à sa mort imminente impuissante.
Ses yeux étaient prêts à jaillir de leurs orbites. À cause du manque d'oxygène dans son cerveau, sa vision se flouttait et elle était dans l'incapacité d'identifier celui qui l'étranglait. Pourtant, ces yeux d'une noirceur insondable qui la fixaient, elle les connaissait.
Peu à peu, le noir s'installa totalement dans son esprit. Hinata ne se débattit pas, elle laissait simplement la vie la quitter.
Et juste au moment où elle sentait les vaisseaux sanguins sauter dans ses globes oculaires, il lâcha prise. Elle ouvrit prestement les yeux et la bouche afin de respirer tout l'air du monde. Son cœur mit un long moment avant de pouvoir battre à un rythme normal. Perdue et désorientée, Hinata était dans l'incapacité d'expliquer ce qu'il venait de se passer.
Son âme avait été emportée par la faucheuse et elle ne pouvait plus retrouver son corps. Vidée de toutes émotions, elle s'enfonça plus profondément dans le matelas, espérant y trouver un quelconque sentiment.
Dans cet état presque comateux, elle sentit à peine les cheveux qui chatouillaient son visage et les mains qui se baladaient sur son corps. Deux lèvres se posèrent sur son cou et le dégoût s'empara à nouveau d'elle. Elle sursauta et l'homme se dégagea pour la regarder avec un rictus satisfait sur le visage.
Comment passe-t-on d'une strangulation à un suçon ? Hinata se posa cette question avant qu'elle ne s'efface dans le vide qu'était de nouveau son esprit. En l'espace de quelques secondes, Hinata avait été englouti dans un trou noir où le vide l'étouffait. Ces quelques secondes lui avaient semblé être une éternité. Seulement, il venait de tout changer.
Ce baiser, dans son cou, elle l'avait détesté. Du plus profond de son âme, une émotion avait germé. Hinata était morte et il venait de la ressusciter.
— Recommence... fit-elle d'une voix presque inaudible à cause de ses cordes vocales écrasées.
Il la regarda étonner avant de se lever et s'éloigner d'elle. Hinata ne voyait plus aussi clair qu'avant, mais elle sentait le néant l'envahir de nouveau et son seul moyen d'en sortir disparaître derrière une porte.
Sasuke était son persécuteur, mais grâce à lui, elle ressentait à nouveau. Et sans lui...
Elle n'était plus qu'un corps sans âme.
*
— Ça fait maintenant près d'une semaine et nous ne savons toujours pas ce qu'elle a...
Sakura avait beau leur expliquer chaque jour les mots de Tsunade, ils espéraient toujours que son discours change.
— ...Nous avons soigné les problèmes que sa fausse couche a entraînés... continua la rose, l'air aussi triste que ses interlocuteurs.
— ...Et normalement, elle va bien.
Le visage de Naruto perdit toute trace de tristesse. Une rage profonde se lisait sur ses traits, bien que Sakura savait qu'elle ne risquait rien, elle eut toutefois un mouvement de recul.
— Elle va bien ? répéta-t-il menaçant.
— Naruto, calme toi. s'empressa Hyashi, le père d'Hinata.
— Si elle va bien, pourquoi elle ne rentre pas à la maison ? hurla-t-il. Pourquoi ne vient-elle pas nous parler ?
Habituée à ses crises, Sakura se contenta de baisser ses yeux verts et de regarder le sol. Il lui criait dessus à chaque fois qu'elle lui parlait de l'état de la jeune Hyuga, personne ne semblait vouloir prendre sa défense... Se ressaisissant, Sakura se rappela qu'elle n'était pas celle à plaindre et, qu'en tant qu'amie, elle se devait de supporter cela.
— Je suis désolée, Naruto. fit la rose, une larme coulant le long de sa joue. Hanabi, Hyashi et même vous les amis. Je...
— Ce n'est pas ta faute, Sakura.
Sasuke, qui venait sûrement d'arriver, vint la prendre dans ses bras devant tout le monde. Elle pleura de plus bel tandis qu'il lui caressait le dos tendrement. Au début, toute la bande avait été étonnée de voir l'Uchiwa se présenter à l'hôpital, car lui et Hinata n'avaient jamais été proches. Mais, quatre jours plus tard, ils n'y prêtaient plus vraiment attention.
— Naruto, tu devrais apprendre à contrôler tes émotions. dit-il sèchement au blond.
— De quoi je me mêle ? répliqua-t-il sur le même ton.
Exaspérée par cette dispute naissante, Sakura roula des yeux en s'essuyant le visage avec une pochette que lui avait tendue Ino, sa meilleure amie et sa rivale de toujours.
— Ça suffit, vous deux. Hinata ne se réveillera pas en vous entendant vous disputer.
— Ouais, on en peut plus de vous entendre. Pas vrai le vieux ? fit Kiba, l'ami le plus cher d'Hinata, pour Hyashi.
Ce dernier n'était plus dans la salle d'attente, Hanabi non plus.
— C'est malin, ça ! râla Ino. Vous les avez fait fuir.
Naruto sortit en trombe de l'hôpital, un Sasuke agacé sur ses talons.
Ils soupirèrent de concert avant que chacun ne commence à rentrer chez lui. Kiba et Ino, en couple depuis quelques semaines, s'en allèrent ensemble. Quant à Shino, il resta plus longtemps et n'en fit de même qu'après le départ de Tenten, Lee et Shikamaru. Neji fut le dernier.
Sakura l'observait chaque jour. Il venait souvent tard, bien après leurs amis, afin de rester plus longtemps. Hyashi Hyuga avait spécialement tenu à ce que les heures de visite ne soient plus d'actualité. Ainsi, les proches de la brune pouvaient venir quand ils le souhaitaient.
C'était ainsi chaque jour. Hinata recevait des visites du matin au soir, mais uniquement ses proches avaient le droit de rentrer dans sa chambre. Et à la fin de la journée, Sakura leur faisait le bilan de son état, qui n'avait pas vraiment changé en une semaine. Et chaque fin de journée se soldait par une énième dispute.
— Tu devrais rentrer, Neji. lui souffla-t-elle en déposant une main sur son épaule. Je compte en faire de même, une infirmière prendra la relève.
Il ne réagit pas à son contact et continua à fixer le visage pâle de sa cousine.
— Je suis sûre qu'elle se réveillera bientôt.
— Tu n'en as pas marre ?
Surprise, Sakura ne comprit pas la question.
— Pardon ?
Neji Hyuga soupira avant de se lever pour se retrouver en face de la jeune Haruno. Sakura rougit de leur proximité, mais fut incapable de reculer car il dardait sur elle un regard implacable de ces yeux nacrés propres à la famille Hyuga.
— Tu es d'une hypocrisie sans nom. Tu te sers de l'état d'Hinata pour t'attribuer les bonnes grâces de Sasuke. Tu ne perds pas une seule occasion de te faire bien voir. Et, pour une personne censée être inquiète pour son amie, tu vas parfaitement bien et tu t'en fais tellement pour les autres que ça ne peut être vrai.
— Mais ? bafouilla-t-elle.
— Enfin, ce n'est que mon analyse personnelle. Et il faut noter que ça m'arrive parfois de me tromper...
Après un dernier regard, il la dépassa et marcha vers la porte qu'il ouvrit. Cependant, avant de sortir de la chambre, il s'adressa à elle :
— ...Bien que, pour ton cas, je pense avoir visé juste.
Et sur ces mots, il s'en alla.