• Chapitre 48 •

                                    

                                          
Naomi
J'immobilise ma jambe qui ne peut s'empêcher de gigoter. Mon corps est pris par de multiples séismes, j'angoisse. 
Nous arrivons ensemble ce matin, est-ce que les gens vont dire quelque chose ? Est-ce qu'il y aura des journalistes ? Sommes-nous un couple ? 
— Monsieur, mademoiselle. Vous êtes arrivés.
Chesters m'arrache de mes pensées.
— Merci. 
Adan est calme, constamment calme. Il sort de la voiture sans l'aide de Chesters, je tire la poignée et pose un pied au sol, retenant mon souffle. 
— Je vous souhaite bon courage, mademoiselle. 
— C'est gentil, merci Chesters. 
Il hoche la tête avec un sourire réconfortant. 
L'immeuble auquel j'ai été habituée pendant plusieurs années me semble bien plus grand, plus impressionnant.
Adan se poste à mes côtés et glisse une main dans le bas de mon dos, les frissons me prennent de haut tandis que les regards se tournent vers nous. Dont un que je n'apprécie pas particulièrement, Joyce Sliger.
— Adan, bonjour je voulais vous souhaiter bonne chance pour la réunion de ce matin, je serai également présente alors, si vous avez besoin de mon aide pour quelque chose, n'hésitez pas. 
Son ton mielleux m'agace autant que son regard aguicheur. Garce, garce, garce...Chante ma conscience sur le rythme « Boys Boys boys » de Sabrina. 
— Merci mademoiselle Sliger mais, j'ai déjà une assistante. 
Dans ta face, vipère. 
Elle montre sa parfaite dentition à Adan puis tourne les talons, remuant ses fesses avec exagération. 
La réunion se déroule plutôt bien pour le moment, je me suis détendue grâce à la présence d'Adan à mes côtés et celle de Rick qui me lance parfois, des regards d'encouragement. 
Je me rassois immédiatement après avoir pris la parole. Un homme dans la cinquantaine se lève et replace sa cravate à motifs triangulaires. 
— Pour revenir au sujet de la réception. 
Récemment, mon équipe et moi avons pensé à renouveler les postes de secrétaire, au cours des nombreuses années avec monsieur Gale Brown, nous avons pu remarquer que le dynamisme des femmes à l'accueil a chuté d'année en année, nous avons donc réfléchi à embaucher des jeunes femmes avec plus de vivacité pour occuper ces postes. 
J'écarquille les yeux de surprise, vient-il de dire ce qu'il vient de dire ? Je n'en reviens pas...Comment peut-il dire une chose pareille ? C'est une grande forme de discrimination, les femmes plus âgées sont tout aussi dynamiques que les jeunes femmes. 
— Et puis, les hommes aussi sont très compétents pour la réception...
Je bougonne dans mon coin mais, tous les regards pivotent de mon côté. Et merde...
— Oui ? Avez-vous quelque chose à dire ? 
Il me scrute d'un air arrogant. Quel vieux croûton. 
— Bien, puisque la demoiselle n'a rien à dire...
— En fait, osé-je, je voudrais ajouter quelque chose. 
Son regard se fait noir, il est contrarié. Je lance un coup d'œil à Adan qui m'observe sans dire un mot.
— Euh...Eh bien, ( je prends une ample inspiration et me lance.) Je pense que nous ne pouvons pas remplacer ces femmes par des « plus jeunes » comme vous le dites. Je trouve cela vraiment dommage et inadmissible de rejeter ces femmes pour leur manque de dynamisme. Pour gérer un poste à la réception, les principaux critères importants sont, le respect, la courtoisie, la gentillesse et le sourire. Certes, une femme dynamique est toujours utile mais, renouveler ces postes ne ferait qu'empirer la situation. 
Qu'allez vous dire aux médias lorsqu'ils apprendront que la Brown'sEntreprise a licencié des secrétaires trop « âgées » selon eux ? Tout ceci ne serait que perte de temps et d'argent. De plus, les réceptionnistes hommes sauront également satisfaire les services des clients. 
Je me rassois, essoufflée et tendue comme un arc. N'aie-je pas été trop loin ? Est-ce que c'était assez correct ? L'homme me dévisage, des éclairs pleins les yeux. Le silence me fait face, zut...ils ne sont pas d'accord avec moi si ?
— Bien, je pense que tout est dit. 
Intervient calmement Adan. 
La réunion continue sans aucun commentaire déplaisant, je considère que mon analyse n'était pas si mauvaise que ça. J'évite de croiser le regard mauvais du vieux croûton et pose mes mains sur mes genoux qui se sont arrêtés de trembler. 
Plusieurs personnes sont venues me féliciter pour cette brave intervention, cela m'a rendue heureuse de savoir qu'elles pensaient tout de même comme moi. Au moment où la pièce commence à se vider, Adan s'approche de moi et me glisse à l'oreille.
— Tu m'impressionnes Anderson, bien joué.
Il ne pouvait pas me faire plus plaisir...
Je souris, fière de moi et salue la dernière personne qui disparaît de la pièce.
Adan referme la porte et s'y adosse. 
— Je pensais que tu étais stressée par tout ça ? Il semblerait que non. (Il sourit.)
— Je l'étais, ses propos m'ont juste déplus...Allais-tu lui dire quelque chose avant que je n'intervienne ?
— Sûrement, j'ai déjà eu un mauvais aperçu de cet homme auparavant, accepter sa demande m'était impensable. Par contre, je ne m'attendais pas à ce que tu nous partages ton avis.
J'hausse les épaules, satisfaite de ma petite surprise involontaire.
— Il en faut peu pour vous surprendre monsieur Brown...
— Détrompez-vous, je ne me laissais jamais surprendre auparavant. Vous êtes pour moi un vrai coup de théâtre, mademoiselle Anderson. 
Un vrai coup de théâtre ?
— Je vous retourne le compliment. Fais-je, la mine coquette.
Il plisse les yeux. C'est alors que je remarque, la tension électrique dans la pièce. J'ai peut-être trop joué...
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