J'ai retrouvé l'endroit où a été enterrée Ambre. Comme elle n'avait personne, pas de famille, c'est une petite concession maigrichonne au milieu de grandes plaques de marbre, où seul son nom est indiqué. J'ai fait changer ça dès que je l'ai vue.
Je ne veux pas de plaque de béton pour Ambre. Je veux un parterre de fleurs.
Je ne veux pas une minuscule concession. Je veux une parcelle complète.
Et je ne veux pas qu'elle dorme là, seule, pour l'éternité. Je veux qu'elle repose avec celle qu'elle aime.
J'ai utilisé l'argent de son héritage. Celui que je n'arrivais pas à me convaincre à utiliser. Je préfère l'utiliser pour elle. Je n'ai pas le droit de l'enterrer hors d'un cimetière, donc le plan de l'enterrer sous un arbre est mal parti. Mais j'ai acheté une grande parcelle. J'ai fais déplacer son cercueil. Et, à ses côtés, dans le même trou, j'y ai fait mettre celui de Cheshire.
Tout a été rebouché. Une magnifique plaque commémorative marque le lieu, ainsi qu'un parterre de fleur. Pourtant, je me sens vide. J'ai tenté de bien faire, mais ça ne suffit pas à remplir le vide qu'à laissé leur départ en moi. Je n'étais pas venue me recueillir sur la tombe d'Ambre jusque là. Je croyais que, tant que ses meurtriers couraient encore, je n'en avais pas le droit.
Finalement, ce n'est même pas moi qui me suis occupée d'eux. Pire, j'ai laissé la femme qu'elle aimait y aller seule et mourir là bas. C'est même moi qui l'ai abattue. J'ai du mal à tenir une arme, depuis ce jour. Je tremble plus qu'avant. J'ai des souvenirs qui remontent. C'est affreusement déplaisant.
J'ai fait reproduire la photo de Ambre et Cheshire sur la plaque commémorative. Cette petite photo toute froissée et humidifiée par les larmes de sa propriétaire, cette simple image, qui transporte pourtant tant de sentiments et d'émotions. Tant de promesses qui n'ont pu être tenues, tant d'amour qui n'a pu être donné et vécu pleinement.
Cette photo me rappelle mon échec.
J'ai échoué à protéger la première comme la deuxième. Et pourtant, j'avais promis de protéger les deux. Ambre me l'avait demandé, la veille de sa mort. Cheshire me l'avait demandé, quelques jours auparavant. Et me voilà, seule survivante, à me demander pourquoi je suis encore là, et pas elles, devant un foutu lopin de terre planté de fleurs.
Puis, un toucher me ramène à la raison. Marie se tient contre moi, en fixant elle aussi la tombe. Oui... je suis encore là, et j'ai encore des choses à accomplir et à protéger. Je n'ai pu empêcher la mort d'Ambre. Cheshire a choisi elle même de partir. Mais Marie, elle, est toujours là.
Et il me reste des choses à faire.
Un vieil homme longe les tombes en s'approchant de nous, l'air de rien. Il s'arrête devant le tombeau fleuri, et siffle, admiratif.
-C'est une belle tombe. J'aimerais beaucoup reposer dans un endroit comme celui là.
-Bonjour, Maître Fermann. L'accueille Marie sur un ton doux.
-Bonjour, Maître. Dis-je à mon tour. Quelles sont les nouvelles?
-Eh bien... comme je m'en doutais, il semble que mon collègue, Maître Borsky, qui s'occupait du testament du regretté M. Rigotti, n'a en effet pas été retrouvé suicidé... étrangement, donner votre nom au commissariat m'a très facilement ouvert les portes à certaines archives secrètes de l'ancien Commissaire.
-Étrange, en effet. Dis-je avec un petit sourire. Les hommes de Vlad semblent avoir bien pris possession des lieux.
-Une fois cela vérifié, je suis donc allé fouiller son bureau, jusque là gardé sous scellés pour une raison inconnue. Continue-t-il. En effet, il semblerait que ceux ayant orchestré sa mort... ne savaient pas où il gardait ses documents précieux, et n'ont donc pas pu tout détruire. J'ai cependant pu en déduire que Monsieur Sforza, en l'absence de Madame Rigotti ici présente, s'est arrogé le droit de toucher l'héritage en son nom.
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La Prédatrice
RomancePersonne ne connaît son vrai prénom, mais elle se fait simplement appeler Shi pour le travail. Ça signifie mort, et c'est une excellent pseudonyme, puisque c'est ce en quoi consiste son travail. Elle est une prédatrice, et elle méprise les proies. J...