-Marie?
-Shiiii!
Une petite boule d'énergie me saute au cou alors que je franchis le pas de la porte.
-Hahaaa, salut ma belle. Tu as passé une bonne journée?
-Non.
Au moins, la réponse est claire, et j'en connais déjà la cause.
-Je m'ennuie! Continue-t-elle. Alors je lis, puis je fais le ménage, puis à manger, puis je n'ai plus rien à faire, alors je lis à nouveau et j'en peux plus! Je veux sortir! J'étouffe! Je préférais encore vivre à l'entrepôt, au moins je pouvais me promener avec toi.
-Du calme, du calme... tu te souviens, le week end dernier? Je t'ai promis de te trouver un moyen de sortir et même de t'occuper, tout en étant à l'abris.
-Oui, tu m'en as parlé après être rentrée complètement trempée d'un petit boulot, mais tu n'as rien ajouté. Se plaint elle.
L'affaire de la vieille date déjà de quelques jours, et j'ai pressé Jill du mieux que j'ai pu afin d'accélérer les préparatifs, et notamment le rachat. Et elle a fait incroyablement vite, ce qui me laisse à penser qu'elle avait probablement déjà prévu cette histoire depuis quelques temps.
-Il se trouve que ça pourrait être prêt... ça te dit d'aller y jeter un œil?
Marie reste figée un instant, tentant probablement de détecter une quelconque trace de sarcasme dans mes propos. Sarcasmes qu'elle ne trouve pas.
-C'est vrai?? C'est vrai???
-Je te préviens qu'il y aura du boulot! Dis-je en riant face à son visage enfantin empli d'excitation.
-Oooh, merci, merci, merci Shi!
-C'est pas moi qu'il faudra remercier, mais une amie du nom de Jill.
Et une vieille peau décédée dans un accident, aussi. Je ne ressens pas le besoin d'exprimer cette pensée.
Nous nous mettons donc en chemin. À pied, c'est un peu loin, mais si nous retournons dans mon appartement, mon terrier, mon vrai chez moi, alors ce sera à deux pas. Le bar de la vieille Svarski est à l'opposé du Sappho par rapport au terrier, dans une des rues bien plus larges et lumineuses du 8e, au rez de chaussée d'un haut immeuble. Seul une chose a changé depuis mon dernier passage: le nom du bar. Je n'avais pas vraiment fait gaffe en y entrant - c'était du russe je crois, ou une autre langue imprononçable d'Europe de l'est. Mais maintenant, une nouvelle enseigne indique fièrement le nom du lieu:
-Le Mytilène? M'interroge Marie, et je hausse les épaules comme seule réponse.
Une tête surgit de l'encadrure de la porte, et le visage de Jill apparait.
-Salut les filles. Lance-t-elle en s'avançant vers nous.
-Jill, c'était sensé être une surprise... dis-je en soupirant. Tu ne pouvais pas attendre dedans?
-Rhoo j'étais impatiente, écoute. Ce n'est pas tous les jours qu'on assiste à une inauguration comme ça.
-Une inauguration? Demande Marie, curieuse.
-Quoi, elle n'est pas au courant? Me demande Jill.
-Quelle partie du mot "surprise" ne comprends tu pas, Jill?
-Ah... bien vu. Désolée, je ne l'avais pas compris dans ce sens là.
Elle se retourne vers Marie, qui recule un peu. Il faut dire que Jill est un peu intimidante. De longs cheveux noirs ramenés en couettes qui lui descendent au milieu du dos, un visage fermé et sévère, et un air détaché, malgré sa petite taille. Et surtout, ses deux yeux, noirs comme de l'encre, qui semblent toujours te sonder.
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La Prédatrice
RomancePersonne ne connaît son vrai prénom, mais elle se fait simplement appeler Shi pour le travail. Ça signifie mort, et c'est une excellent pseudonyme, puisque c'est ce en quoi consiste son travail. Elle est une prédatrice, et elle méprise les proies. J...