Chapitre 26 : Le rêve enflammé.

                                    

                                          
Août 2001. Le regard perdu dans les flammes, une petite fille âgée de six ans fixe le feu se propager, de branches en branches, d'arbres en arbres. De là où elle se situe, elle entends des cris de douleur et d'horreur. Ces cris, elle sait ce que c'est. L'odeur de chair brûlée se répands jusqu'a ses narines, si fragiles et si délicates. Les flammes de couleur orangée montent vers le ciel étoilé. La petite fille admire encore ce spectacle quelques minutes avant de s'écrier d'une voix forte et grave qui ne semble pas lui appartenir : "TU VOIS, MAMAN ? J'AI TUÉ LES MÉCHANTS ! JE LES AI TUÉ ET J'AI SAVOURÉE CHAQUE MINUTE DE LEURS SOUFFRANCES ! JE LES AI TUÉ POUR TOI !" 
Une main anormalement grande et pâle se pose sur l'épaule de l'enfant. La petite se retourne et voit un visage blanchâtre, aux traits faciaux inexistants, et vêtu d'un costard aux couleurs sombres. C'est Lui. Il est revenu et Il sait ce qu'elle a fait. Il est très fier d'elle. Le contraste est saisissant. La petite fille a des tâches de rousseur sur les joues, des cheveux châtains foncés, des yeux bleus pâles, et la peau aussi blanche que la créature. Cependant, c'est une humaine et Lui, un monstre. Et c'est cela qui fait leur principale différence... l'enfant sourit d'un air sadique avant de prendre le démon dans ses petits bras et... 
                          
Je me réveille, la poitrine haletante, les yeux révulsés et des gouttes de sueur perlants sur mon front. J'essaye de reprendre mon souffle le plus lentement et le plus calmement possible. 
- J'ai l'impression que tu es exténuée... 
Cette voix ! Elle appartient à quelqu'un que je connais. Je me retourne et fixe l'homme qui se tient devant moi. Ses cheveux sont aussi noirs que l'ébène, ses yeux sont cerclés de noir et un sourire est gravé sur son visage pâle. Ses lèvres rouges sang forme un contraste avec sa peau blanche qui elle forme elle aussi un contraste avec ses cheveux. Frappée de stupeur et de fascination devant ce magnifique clair-obscur, je ne parviens pas à détacher les yeux de cet étrange inconnu qui me semble familier et que pourtant, je ne reconnais pas. Soudain, après quelques minutes de silence, mes souvenirs me reviennent, éparpillés dans mon esprit embrûmé. Je mets un peu de temps à me souvenir de ce visage et à retrouver ma mémoire. 
- Tu t'es écroulée dans le grenier, mercredi soir. Tu avais perdue connaissance. J'ai eu très peur sur le coup, et comme tu respirais à peine, je me suis beaucoup inquiété.. Daisy nous a rassuré et nous a informé que tu n'avais rien mais qu'il fallait que tu te reposes un peu. Ah ! Si tu savais comme j'ai eu si peur pour toi...
                          
Le garçon  me saute dessus et me serre fort dans ses bras. Un peu surprise par cette marque d'affection inattendue mais néanmoins touchée, je lui rends son étreinte avec la même vigueur. 
- Jeff... chuchotais-je. 
- J'ai eu trop peur... je ne m'en remettrais pas si il t'arrivait quelque chose, Mathilde, vraiment pas... 
Il s'éloigne de quelques pas avant de prendre mon visage dans ses mains et de m'embrasser sur la joue. 
C'était un baiser tout simple. Amical, rien de plus mais qui pour moi, renfermait tellement de choses et tellement d'émotions contradictoires... de la peine, de la douleur mais aussi de la gentillesse et du soulagement... je n'aurais jamais cru cela possible de la part de Jeff. 
                          
Le creepypasta rougit soudainement et je retiens un fou rire en voyant son expression. Je ne savais pas qu'un tueur pouvait faire preuve d'une telle sympathie envers moi, en tout cas, cela me sidère et me fait rougir de plaisir, en même temps. 
- Tu as dormie deux jours, continua Jeff tout en détournant la tête, Masky, Hoodie, Toby, Daisy et moi, on a veillé sur toi pendant des heures et des heures. On continuait à avoir très peur pour toi... Masky s'est comporté étrangement durant ta convalescence. Un coup, il était triste, un coup, il était en colère et vice-versa... enfin bref... vas comprendre ce qu'il ressentait. 
                          
Le comportement de Masky était étrange en effet. Je ne l'avais jamais connu comme ça mais j'imagine que ce n'était que passager. Maintenant que j'étais réveillée, il allait se remettre à se comporter normalement avec moi. Après tout, c'est normal qu'il se soit inquieté pour moi... 
Je releva les yeux vers Jeff qui continuait à se ronger les ongles... une habitude toujours aussi irritante chez lui mais bon. 
- Ça va, Mathilde ? Tu sembles bizarre... me demanda Jeff en s'approchant doucement de moi. 
- J'ai fais un songe très singulier, répondis-je d'une voix dénuée de toute émotion. 
- Raconte ! 
Je me mordis les lèvres, le regard éteint et alors qu'il s'apprêtait à me presser davantage, je posa mes yeux vers le miroir de ma commode, sans regarder le creepypasta. 
                          
- J'ai rêvé d'une petite fille qui était dans une forêt. La forêt brûlait et elle, elle semblait jouir devant cet incendie. Et puis, à un moment, après avoir criée, elle s'est retournée vers Slenderman qui lui aussi la regardait de son visage inexistant. Lui aussi, semblait être extatique... c'était très malsain... et en plus j'avais l'impression que tout cela était réel... même si... bon... ce n'était qu'un rêve... 
                          
Jeff avait les yeux exhorbités. Il s'apprêtait à me dire quelque chose lorsque Masky est entré et s'est avancé vers moi, tranquillement, comme si rien ne pressait. Jeff ouvrit la bouche pour me dire quelque chose quand Masky l'interrompit d'un geste avant de lui désigner la porte. Le garçon sortit, me laissant seul avec le proxy. 
                          
- Bon alors, miss Rykers, on dirait bien que tu as repris tes esprits... on s'est fait un sang d'encre pour toi, après ta perte de connaissance, dans le grenier... on ne sait pas ce qu'il s'est réellement passé mais en tout cas, on a paniqué... 
- ... Cela est très bizarre... jamais, je ne me serais écroulée en temps normaux... je... je n'ais jamais été comme ça... 
- Ça arrive a tout le monde, Mathilde, me rassura Masky, ce n'est pas de ta faute... mais c'est vrai que si tu veux mon avis, ce n'est pas normal... 
                          
Je suis au beau milieu de mes réflexions quand soudain, Masky saisit doucement ma main dans la sienne. Ce contact me fait de l'effet, certes, mais je me reprends bien vite. Je ne dois pas y prêter attention. J'ai autre chose à faire que d'avoir des émois digne d'une collégienne pré-pubère. Je reporte mon regard vers la fenêtre tandis que Masky continue à me caresser la main. Je reste indifférente à ce contact. Je reporte mes yeux vers le proxy qui se préparait, semble-t-il, à me dire quelque chose d'important. 
                          
- Lundi, nous irons capturer Enzo Grinberg. Nous avons ses coordonnées grâçe à BEN et nous sommes tous prêts à aller en découdre. J'imagine que c'est cool pour toi... tu vas t'apprêter à en découdre avec lui donc prépares-toi !