Chapitre 19-1

                                    

                                          






— Oui Monsieur, mais l'un des messagers est de retour et souhaiterait vous voir de toute urgence, répondit-il nerveusement en passant d'un pied sur l'autre.  
— Déjà ! Ce n'est pas très bon signe, répondit Wade d'un ton préoccupé. Dites à Gabriel et à Connors de nous rejoindre ici immédiatement, reprit-il après quelques secondes de réflexion. Et...vous avez bien fait de me prévenir, ajouta-t-il au moment où le jeune homme quittait la pièce.
Cette petite marque d'encouragement me surpris de sa part et le fit remonter un peu dans mon estime. Bien qu'à mon avis il ne l'ait pas du tout fait pour cela.
— Très bien, j'ai des affaires urgentes à régler. Je vais donc vous laisser entre les mains de Gabriel, qui finira de vous expliquer tout ce que vous avez besoin de savoir.  
Au moment où j'allais ouvrir la bouche pour protester, la porte s'ouvrit et Connors et Lynch entrèrent. Aucun des deux ne jeta un coup d'œil dans ma direction tandis qu'ils pénétraient dans la pièce, qui vu sa taille, commençait à être un peu surchargée. 
— Gabriel, tu vas te charger de...Whisper. Lui donner les informations qu'elles auraient dû avoir depuis longtemps et...trouver comment elle pourrait se rendre utile maintenant qu'elle est là. 
Je cru que j'allais m'étrangler tellement j'étouffais de rage. Non mais c'était quoi son problème ? 
— Vous êtes au courant de l'accident qui a eu lieu à l'entrainement aujourd'hui ? Lui demanda Connors tout en avançant ostensiblement d'un pas pour se retrouver dans son champs de vision.
— Bien évidemment. Mais les accidents à l'entraînement sont malheureusement fréquent et l'on m'a rapporté qu'il n'y avait eu qu'un blessé, alors pourquoi me parler de cela maintenant ?
— Parce que sans Hayden, c'est un mort que nous aurions eu à déplorer et non un blessé. Je trouvais utile que vous le sachiez.
Même si je me doutais de ce qu'il s'apprêtait à dire, je fus néanmoins gênée d'être mise ainsi en avant. Je baissais donc la tête à l'instant où les regards surpris de Wade et Lynch se posèrent simultanément sur moi. 
— Ah oui, Lynch m'avait dit que vous assistiez de temps en temps l'infirmière à l'E.E.V. Une assistante médicale c'est toujours utile...
— Vous m'avez mal compris, insista Connors me plongeant encore plus dans l'embarras. Hayden l'a opéré. C'est elle qui a pris la situation en main lorsque Henry a refusé de s'en occuper, déclarant qu'il était perdu sans même l'examiner, continua-t-il d'une voix pleine de mépris.
Wade ne dit rien et se contenta de m'observer d'un air concentré.
— Vous êtes décidément pleine de surprise, commenta-t-il en me lançant un regard un peu moins dédaigneux que d'ordinaire me sembla-t-il. La médecine vous intéresse ? 
Sa question abrupte et son ton sérieux, pour une fois sans aucune moquerie sous-jacente, me surpris, me forçant à relever la tête. Ils me regardaient tous, attendant visiblement ma réponse avec fébrilité. Ce qui, de mon point de vue, n'avait aucun sens. En quoi mes aspirations de carrière pouvaient-ils bien les préoccuper ? 
— En quoi cela vous intéresse-t-il osais-je finalement lui demander après quelques secondes de réflexion. 
— À l'évidence, nous manquons de personnel médical et...vous semblez qualifiée pour le poste. Donc félicitation, il est à vous, me sortit précipitamment Wade tout en se dirigeant vers la porte, comme si le sujet ne l'intéressait déjà plus. 
— Quoi, comme ça ? Mais...et Henry...
— ...sera plus que ravi vous laisser la place, me coupa-t-il d'un ton agacé. C'est réglé n'en parlons plus, acheva-t-il d'un ton sans réplique.
— Attendez ! Il ne faudrait pas que cela lui prenne tout son temps, commença à se plaindre Lynch.
— Ça ce ne sont pas mes affaires, à vous de vous organiser, répondit Wade d'un ton impatient tout en ouvrant la porte d'un geste vif. Connors, venez avec moi, nous avons déjà perdu assez de temps. 
Et sur ces belles paroles il quitta la pièce, Connors sur ses talons. Un silence pesant s'installa immédiatement entre Lynch et moi. Nous nous regardions en chien de faïence, n'ayant visiblement ni l'un ni l'autre envie d'entamer la conversation. Je savais que si j'ouvrais la bouche, se serait pour dire quelque chose d'agressif et de désagréable, il valait donc mieux que je m'abstienne...ou pas, me dis-je finalement.
— Visiblement vous ne me supportez pas. Alors pourquoi avoir compromis toute votre mission pour moi, lui demandais-je un peu plus agressivement que je l'aurais voulu au moment où il s'apprêtait lui-même à prendre la parole. 
— Parce que vous êtes trop précieuse pour que je prenne le risque de vous perdre. 
— Toujours le même refrain, mais sans jamais l'explication qui va avec, m'exclamais-je passablement énervée.
— Nous aurons toute l'occasion d'en reparler lorsque vous commencerez votre formation.
— Et les autres changeantes elles sont devenues quoi, lui demandais-je soudain, ouvertement agressive cette fois-ci, tandis que je m'avançais vers lui.
— J'ai fait tout ce qu'il fallait pour qu'elles ne soient jamais découvertes, me répondit-il en passant la porte d'un pas rageur. 
— Elana en faisait partie, l'accusais-je plus que je ne lui posais la question, en le rattrapant avant de me placer devant lui d'un mouvement brusque.
— Non, me répondit-il d'un ton exaspéré tout en levant les yeux au ciel, comme si il sermonnait une gamine de dix ans. Combien de fois faudra-t-il que je vous répète que cette fille n'a aucun don particulier, à part d'être particulièrement casse-pied. Bien qu'elle soit quand même très loin d'atteindre votre niveau, me balança-t-il, un grand sourire moqueur sur le visage. 
Je m'apprêtais à lui dire clairement ce que je pensais de ses commentaires désobligeants, quand quelque chose me frappa. Pourquoi faisait-il ça, me provoquer ainsi ? Cela n'avait pas de sens. À moins qu'il ne cherche à obtenir une réaction précise de ma part. Ou alors c'était simplement un abruti prétentieux ! Dans le doute, je préférais m'abstenir et me contentais donc de ronger mon frein, les poings serrés et l'œil assassin. C'est le moment que choisi Connie pour faire son apparition.
— Que fais-tu là toi, lui demanda Lynch comme il aurait parlé à un chien.
— Tu as vu l'heure, lui répondit-elle sur le même ton sans se laisser démonter par son attitude désobligeante. Je suis venu tirer cette pauvre Whisper de vos griffes, pour qu'elle puisse enfin se reposer. Viens, me dit-elle. Tu as bien mérité un peu de repos loin de tous ces rabat-joie. 
— Tu as raison, je suis épuisée, entrais-je dans son jeu tout en baillant ostensiblement.
Je dépassais ensuite un Lynch au bord de l'apoplexie et c'est avec un petit sourire satisfait sur les lèvres, que je m'engageais une fois de plus dans les couloirs obscurs à la suite de Connie.