Chapitre 6 : Dénigrement.

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Chapitre 6.1 : Dénigrement.

La clarté matinale pénétra soudainement dans la chambre de Marianne, incitant la Duchesse à plisser les yeux, irritée. Elle était saturée de tout, de cette existence terne et dénuée d'attrait. Rien ne parvenait plus à la divertir ni à susciter son rire. Sa relation avec le Duc de Villiers avait perdu de sa substance, laissant place à une mélancolie persistante. Marianne regrettait profondément cette évolution, mais semblait piégée dans une spirale infernale. Un tourbillon de dégoût envers elle-même l'envahissait pour n'avoir su préserver la vie de leur enfant. Un cercle de tristesse la dévorait de l'intérieur.

Se redressant dans son lit, Marianne observa sa femme de chambre attitrée, Pauline Lambert, occupée à attacher les rideaux. Bien que cette dernière fût véritablement bienveillante, son visage affichait désormais une moindre propension au sourire. La Duchesse avait une idée précise de la raison : l'arrivée de Mademoiselle Julia Leclaircie en tant que nouvelle gouvernante en chef l'avait profondément affectée. En tant que femme de chambre en chef, Pauline avait probablement envisagé que le départ de Madame Dubois la propulserait enfin vers la réalisation de son rêve de devenir gouvernante. Cependant, cette aspiration ne se concrétiserait jamais, du moins pas au sein de cette demeure.

Agacée par ses propres pensées, la maîtresse de maison laissa échapper un soupir.

— Tout va bien, Madame ? interrogea immédiatement Mademoiselle Lambert, toujours prévenante.

— Oui, oui, Mademoiselle Lambert, je vous remercie, répondit Marianne avec un sourire faible, tentant de remettre en ordre ses cheveux légèrement ébouriffés dépassant de sa longue tresse brune.

— Ai-je fait quelque chose qui vous a contrariée ? continua la femme de chambre.

Marianne croisa le regard de Pauline Lambert, qui se tenait droite dos à l'une des grandes fenêtres de la chambre, désormais dépourvues de rideaux.

— Non, Mademoiselle Lambert, ce n'est pas vous. Je rumine dès le matin.

Rassurée, la femme de chambre hocha respectueusement la tête avant d'ouvrir la fenêtre centrale pour laisser entrer l'air frais, comme elle le faisait chaque matin.

Tant Mademoiselle Lambert que Marianne partageaient un sentiment commun : elles méprisaient toutes deux profondément Mademoiselle Leclaircie. Pour des raisons différentes, mais leur aversion envers elle était palpable. Cette femme avait créé une onde de choc dans tout le château : belle, intelligente, respectée, et bien d'autres qualificatifs qui ne laissaient personne indifférent. Marianne avait remarqué les hommes la contemplant avec fascination, même son propre fils Charles, dont le regard brillait en sa présence. Un amusement intérieur l'avait habitée pendant des jours, car son fils avait sûrement rapidement compris qu'elle était loin de son niveau. Elle connaissait les désirs masculins, et son fils n'y faisait pas exception.

Cependant, ce qui l'avait véritablement contrariée n'était pas tant cela, mais plutôt l'attention particulière qu'Henri semblait accorder à Mademoiselle Leclaircie. Son regard pétillant et son comportement inhabituel la perturbaient énormément. Elle soupira, s'asseyant complètement dans son lit. Pauline Lambert se dirigea vers le bureau où elle avait déposé le plateau du petit déjeuner avant d'ouvrir les rideaux. Elle prit le plateau et le positionna de manière à le maintenir sur les jambes de Marianne, assise sur le lit.

Marianne contempla son petit déjeuner, submergée par la nausée, comme chaque matin depuis ce jour fatidique. Elle grimaça, Pauline Lambert quittant la pièce en silence. Alors qu'elle prenait la cuillère posée sur le plateau pour tenter de manger, ses pensées se dirigèrent de nouveau vers Henri. Son cœur battait un peu plus vite lorsqu'elle pensait à ce jeune homme si particulier, gentil et beau. Elle culpabilisait de ressentir ainsi envers leur majordome. Ce n'était pas convenable, mais c'était aussi une trahison envers son mari, qu'elle avait pourtant toujours aimé. Elle avait eu la chance de le rencontrer et de partager avec lui le bonheur de l'amour. Il avait été patient avec elle, mais il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas ce qu'elle avait vécu, ce qu'elle endurait depuis la perte de leur enfant qu'elle avait porté pendant neuf mois entiers mais qu'elle n'avait pas su préserver.

Révérences et Révoltes [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant