— À vos marques... prêtes... partez !
Je plonge dans l'eau comme si j'avais fait ça toute ma vie. À Meridia, j'avais l'habitude de côtoyer les lacs et de m'y baigner souvent. J'ai appris à nager quand j'étais petite. Je suis supposée être imbattable. Même si je suis sûrement meilleure au tir à l'arc et aux sports de combat, l'eau est mon milieu.
Alors je commence à nager le crawl, calant mes mouvements sur une cadence effréné. Je n'entends plus rien autour de moi que les applaudissements et les filles qui me suivent à la trace. Areena n'est pas loin, je le devine. Elle a dû s'entraîner toute sa vie pour ce jour. Je ne perds pas une seconde. Je suis rapide et efficace et je sais qu'il n'y a personne devant moi. Mon cœur bat à une vitesse fulgurante, mes muscles sont tendus et me font mal mais je continue de nager comme si c'était la seule chose qui me restait sur terre.
Bientôt, le monde devient flou autour de moi. Mes mouvements me paraissent moins précis et je comprends tout à coup ce qu'Erkel a voulu me dire. L'impression de perdre pieds, que les profondeurs m'attirent. C'était prévisible. Je tente de mettre de côté ces sensations et continue de nager, plus lentement. Mais il est trop tard. Je me sens partir. Je sens mes muscles se relâcher, ma respiration se bloquer. Je manque d'air, j'ai l'impression de tournoyer sur moi-même, que le monde autour de moi n'est plus qu'un néant sans fin.
Alors je me sens partir sous l'eau. Je me débats contre moi-même, contre mon corps épuisé qui tente de remonter à la surface. Et puis soudainement, des pensées traversent mon esprit. Bianca et Eileen ont elles aussi bu du champagne hier. Ce qui veut dire qu'elles sont elles aussi en train de se noyer. Non... J'ouvre les yeux sous l'eau. Je sens que des filles me dépassent pour rejoindre la ligne d'arrivée mais ce n'est plus le jeu qui m'intéresse.
À quelques mètres de moi, une fille se bat contre elle-même pour remonter à la surface. Bianca. Ses longs cheveux blonds flottent autour d'elle alors que des bulles s'échappent de sa bouche et que ses bras esquissent des mouvements désespérés. Alors dans une dernière tentative, parce que je sais au fond de moi que je n'aurais pas assez d'oxygène pour remonter, je nage vers elle.
Je pousse sur mes jambes et l'atteins enfin. J'use toutes les dernières forces qui me restent pour la saisir par la taille et la pousser vers le haut. Elle remonte automatiquement et je vois la lumière en haut, je la vois... Si brillante, si claire. Mais je suis trop loin. Au moins, Bianca aura pu remonter. C'est ce que je me dis en fermant les yeux. Ma tête commence à me faire si mal. Je manque d'air, je suis en train de m'étouffer. Ce n'est pas une douleur physique. C'est la sensation de mourir étouffée qui me transperce. Ce sentiment d'être impuissant, de ne pas pouvoir se battre. Mon corps est congelé.
Ma vision s'obscurcit. Je me sens presque perdre connaissance quand deux gros bras me saisissent et me tirent à la surface. Ma peau me brûle et mes poumons me font si mal lorsque je revois la lumière du jour que je n'arrive pas à reprendre ma respiration. Heureusement, on me tire jusqu'à la berge. Je crache de l'eau, incapable de faire autre chose. De l'air ! Il me faut de l'air...
— More... More, s'il te plaît... Respire... Respire, s'il te plaît... Prends une inspiration, reprends ton souffle...
C'est son beau visage qui me fait face alors que je continue de cracher toute l'eau que mes poumons ont accumulé. Bientôt, j'arrive à reprendre ma respiration. C'est comme un renouveau alors que je suis littéralement au bord de l'asphyxie. Erkel encadre mon visage de ses mains et je le repousse pour pouvoir tousser. C'est seulement au bout de quelques minutes que je reprends pleinement ma respiration. Mes poumons me font toujours mal mais la sensation de mal-être s'est dissipée.
— Merde, alors... J'ai cru que tu allais mourir.
L'inquiétude que je lis dans ses yeux me laisse sans voix. Il s'approche pour me serrer dans ses bras et je ne le repousse pas. Je suis incapable de le repousser, de repousser la tempête de sentiments qui m'a bousculée quand j'ai compris que, oui putain, c'est lui qui m'a sauvée. S'il n'était pas là, je serais déjà morte à l'heure qu'il est.
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𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 3
Romance« Ma grand-mère était une assassin. Ma mère, une voleuse. J'ai sûrement hérité des deux puisqu'en ce moment même, je suis emprisonnée à Meridia pour tentative de meurtre. » Morgan Healthyer, a à peine dix-huit ans lorsqu'elle tente d'assassiner le r...