deux grands empires russe el indien. Les petits États intermédiaires, qui avaient jusqu’ici servi de tampons, ont cessé d’exister, en même temps que la géographie de ces contrées si peu accessibles et jusqu’ici trop mystérieuses pour que la diplomatie européenne y puisse opérer, a cessé d’avoir des secrets. La Russie et l’Angleterre ont déjà entamé des préliminaires de négociations auxquels s’est associée la Chine, qui attache un grand prix à son autorité dans ces régions, et un plénipotentiaire chinois, spécialement délégué pour prendre part à ces conférences, est en ce moment en Europe.
Suivant quel tracé va se faire cette délimitation, ou plutôt quelles sont les lignes frontières que l’une ou l’autre des parties en présence peut aspirer à posséder, et quelles sont les limites en deçà desquelles le souci de sa sécurité future ne lui permet pas de se laisser refouler ? C’est ce que nous allons essayer d’indiquer sommairement.
Déjà les Anglais occupent, avons-nous dit, la ligue de l’Hindou-Kouch dans toute sa partie orientaient partir du 68e degré de longitude Est jusqu’au nœud central où se rattachent les grandes arêtes montagneuses de l’Asie. Ils occupent de même, à l’est de ce grand nœud central, toute la ligne du Kara-Koroum jusqu’au Thibet. Ils ont donc acquis au nord de l’Inde leur grande frontière naturelle, la ligne de partage des eaux, la ligne de faîte du Toit du Monde, après avoir dépassé successivement les chaînes énormes situées en deçà, et qui leur avaient pendant longtemps servi de frontières provisoires. Les premières pentes de ces montagnes, celles qui en forment les contreforts les plus méridionaux, avaient toujours été considérées comme servant de limites septentrionales à l’Inde géographique en même temps qu’aux pays habitables et exploitables : aussi les divers empires indiens, tant anciens que modernes, plus soucieux des revenus que peuvent donner les peuples que de la concordance des frontières de ceux-ci avec les limites des grands bassins hydrographiques, et ignorant des combinaisons internationales auxquelles le concert européen moderne a donné lieu, avaient borné leur autorité aux parties riches et accessibles de l’Indoustan, laissant volontairement en dehors de leurs conquêtes des pays aussi pauvres et aussi improductifs que ceux dont il s’agit.
Les Anglais ont fait une œuvre plus complète : se limiteront-ils même à celle-ci ? Telle ne semble pas être jusqu’à présent, leur intention.
Les dernières propositions faites par eux, et qui, paraît-il, constituent le minimum des concessions que le cabinet de Londres