des zones tempérées et subtropicales. Collectionneur infatigable, auteur fécond, vulgarisateur habile, il a fait connaître par des ouvrages descriptifs, par des rapports et des énumérations raisonnées, toutes les ressources économiques que l’Australie puisait, grâce à lui, soit dans la végétation indigène, soit dans les jardins botaniques du monde entier ; mais, en homme qui veut donner autant qu’il reçoit, c’est avec une ardeur constante qu’il songe à doter les autres pays des richesses naturelles de l’Australie. Dans cette tâche généreuse, nul ne pouvait mieux le seconder que notre compatriote M. Ramel. Nature ardente, expansive, pleine du zèle qui part d’une foi profonde à l’avenir d’une idée, M. Ramel dut presqu’au hasard de devenir le patron de l’eucalyptus. C’était en 1854 ; venu en Australie comme négociant, il se promenait en curieux dans le jardin botanique de Melbourne, lorsque, dans une allée écartée, il vit un pied de blue gum (eucalyptus globulus), qui le frappa par son élégance et sa beauté. Presque étranger à la botanique, il ne connaissait, dit-il, de cet arbre, ni la figure, ni le nom ; mais dès ce moment ce fut son arbre, son idée fixe ; l’occasion de sa liaison intime avec Mueller, de ses relations constantes avec le Muséum de Paris, la Société d’acclimatation, les jardins, les savans, les amateurs. Il crut à l’eucalyptus comme d’autres croient au triomphe du bien sur la terre ; il vit son arbre bien-aimé couvrant les montagnes de l’Algérie, en assainissant les marais, en chassant la fièvre, y remplaçant par des cigarettes odorantes et salutaires les fumigations stupéfiantes du haschich. Ce rêve d’hier est bien, près à divers égards d’être la réalité d’aujourd’hui, car, cigarettes à part, aucun arbre n’est venu en si peu d’années introduire dans la végétation forestière de l’Algérie un élément aussi pittoresque, aussi utile, aussi plein de promesses pour l’avenir.
Alger possédait du reste l’eucalyptus globulus vers 1854, mais c’était sans le savoir et sans connaître le vrai nom de l’arbre. En 1863, parcourant avec M. Hardy la partie du jardin d’essai qui s’élève en pente sur le Sahel, je ramassai sur le sol les boutons d’un arbre déjà fort que je reconnus aisément pour le globulus[1]. Dénégation de M. Hardy, affirmation positive de ma part : la chose n’avait pas en elle-même grande importance, sinon qu’elle prouve qu’il est bon d’avoir l’œil ouvert sur le nom vrai des plantes que
- ↑ Ces boutons, si caractéristiques, sont décrits d’une manière piquante par M. Clamageran dans son intéressant volume intitulé l’Algérie. « Le bouton se compose d’un cône renversé, divisé par quatre arêtes saillantes et fermé par un gros couvercle muni d’une pointe au sommet ; de petites rugosités, saupoudrées de matière blanche, hérissent la surface. On dirait un fragment de roche alpestre couvert d’une fine couche de neige. »