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Page:Osmont - Mes souvenirs, 1941.pdf/41

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sept. Il en est fait un tableau fort remarquable, avec le nom de ces sept éléments, dans les religions du passé, à la fin de l’Âme humaine de Lancelin. Pour ce que je tiens à dire, les trois éléments dont parle Saint Paul sont suffisants. Nous avons un esprit, nous, invisible et qui n’aspire qu’aux choses supérieures ; nous avons un corps, sôma, qui, abandonné à lui-même, est seulement un cadavre. Il existe entre ces deux êtres si dissemblables un agent de liaison, l’âme, psyché, l’être sensitif qui, en principe, devrait obéir à l’esprit et se faire obéir du corps. Quand, comme il est trop fréquent, psyché obéit à son corps, oublieuse de son esprit, et de ses hautes destinées, elle se met en état de péché, car elle n’est pas faite pour avoir du plaisir, mais pour être au service de l’esprit. Ce n’est qu’après un assez long stade d’entraînement que psyché finit par comprendre son vrai devoir et par s’y plaire. Toutes les ascèses, même les plus matérialistes, je veux dire celles qui ne visent pas à autre chose qu’à des réalisations expérimentales, n’ont pas d’autre but que ce dressage de psyché, mais chacun, cherchant ce qui l’intéresse, le réalise comme il peut.

Nous produisons chaque jour un dédoublement involontaire, pendant notre sommeil. L’esprit libéré fait ce qu’il croit utile. Psyché, la bride sur le cou, se promène dans son domaine qui est notre subconscient et les mondes qui lui sont accessibles. De là proviennent les songes qui sont absurdes ou prophétiques, parce que psyché a choisi le monde des réalités futures ou celui de la pure fantaisie pour y faire sa promenade. Il est des gens qui peuvent, à volonté, diriger leurs rêves et des traités fort sérieux existent à ce sujet. Il y a même le moyen de s’imposer en songe à l’objet désiré, ce qui est un moyen comme un autre de lui parler d’amour.

D’autres phénomènes de dédoublement se produisent avec plus de netteté mais avec moins de fréquence. Ce sont les intersignes. Dans toutes les familles de nos côtes et des côtes de tous les pays, on raconte une ou plusieurs histoires de ce genre. Un marin apparaît aux siens dans le moment même où son bateau est en perdition. Parfois il en réchappe, le plus souvent, il est perdu. Mais, à cette heure décisive, il a pensé aux siens avec intensité, revécu tel détail de sa vie qu’il oubliait en temps ordinaire, et si forte est cette pensée qu’elle suffit pour faire apparaître psyché, sous sa forme habituelle chez les parents qui ne comprennent que trop de quel deuil ils sont menacés. On a des sensations du même ordre dans l’anesthésie qui précède une opération. Je me souviens, dans la brûlure de la soif, d’avoir évoqué certain cerisier dans le jardin de mon enfance dont les cerises devenaient le symbole de la fraîcheur.

Un excellent entraînement au dédoublement est la trans-

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