savoir si, en effet, par leurs constitutions, ils étaient solidaires les uns pour les autres ; cette question fournit au Parlement une occasion toute naturelle de demander à voir ces constitutions fameuses, qui jamais n’avaient été ni examinées, ni approuvées avec les formes requises. L’examen de ces constitutions, et ensuite celui de leurs livres, a fourni des moyens juridiques qu’on a cru suffisants pour déclarer leur institut contraire aux lois du royaume, à l’obéissance due au souverain, à la sûreté de sa personne et à la tranquillité de l’État.
Je dis des moyens juridiques car on doit distinguer dans cette cause les moyens juridiques sur lesquels la destruction des jésuites a été appuyée d’avec les autres motifs (non moins équitables) de cette destruction. Il ne faut pas croire que ni les constitutions de ces pères, ni la doctrine qu’on leur reproche aient été l’unique cause de leur ruine, quoique ce soit la seule vraiment judiciaire, et la seule par conséquent dont on ait dû faire mention dans les arrêts rendus contre eux. Il n’est que trop vrai que plusieurs autres ordres ont à peu près pour principe cette même obéissance servile que les jésuites vouent à leurs supérieurs et au pape ; il n’est que trop vrai que mille autres docteurs et religieux ont enseigné la doctrine du pouvoir de l’Église sur le temporel des rois ; ce n’est pas seulement parce qu’on croit les jésuites plus mauvais Français que les autres moines, qu’on les a détruits et dispersés ; c’est parce qu’on les a regardés avec raison comme plus redoutables par leurs intrigues et par leur crédit. Et ce motif, quoique non juridique, est assurément beaucoup meilleur qu’il ne fallait pour s’en défaire. La ligue de la nation contre les jésuites ressemble à la ligue de Cambra contre la république de Venise, qui avait pour principale cause les richesses et l’insolence de ces républicains. La Société avait fourni les mêmes armes à la haine. On était