cependant m’empêcher de faire remarquer que, lorsque les choses sont ainsi organisées, lorsque le gouvernement a pris des proportions gigantesques par la transformation successive des transactions libres en services publics, il est à craindre que les révolutions, qui sont, par elles-mêmes, un si grand mal, n’aient pas même l’avantage d’être un remède, sinon à force d’expériences. Le déplacement de la responsabilité a faussé l’opinion populaire. Le peuple, accoutumé à tout attendre de l’État, ne l’accuse pas de trop faire, mais de ne pas faire assez. Il le renverse et le remplace par un autre, auquel il ne dit pas : Faites moins, mais : Faites plus ; et c’est ainsi que l’abîme se creuse et se creuse encore.
Le moment vient-il enfin où les yeux s’ouvrent ? Sent-on qu’il faut en venir à diminuer les attributions et la responsabilité de l’État ? On est arrêté par d’autres difficultés. D’un côté, les Droits acquis se soulèvent et se coalisent ; on répugne à froisser une foule d’existences auxquelles on a donné une vie artificielle. — D’un autre côté, le public a désappris à agir par lui-même. Au moment de reconquérir cette liberté qu’il a si ardemment poursuivie, il en a peur, il la repousse. Allez donc lui offrir la liberté d’enseignement ? Il croira que toute science va s’éteindre. Allez donc lui offrir la liberté religieuse ? Il croira que l’athéisme va tout envahir. On lui a tant dit et répété que toute religion, toute sagesse, toute science, toute lumière, toute morale réside dans l’État ou en découle !
Mais ces considérations reviendront ailleurs, et je rentre dans mon sujet.[1]
Nous nous sommes appliqués à découvrir le vrai rôle de la concurrence dans le développement des richesses. Nous
- ↑ Voir le pamphlet intitulé Baccalauréat et Socialisme, tome IV, p. 442. (Note de l’éditeur.) Cette note de bas de page ne renvoie nulle part dans le texte ; son placement exact est donc incertain.(Note de Wikisource.)