La Colonne
O toi, dont le noble délire
Charma ton pays étonné,
Eh quoi ! Déranger, sur ta lyre,
Mon sujet n’a pas résonné !
Toi, chantre des fils de Bellone,
Tu devrais rougir, sur ma foi.
De m’entendre dire avant toi :
Français, je chante la Colonne.
Salut, monument gigantesque.
De la valeur et des beaux arts ;
D’une teinte chevaleresque
Toi seul colore nos remparts.
De quelle gloire t’environne
Le tableau de tant de hauts faits.
Ah ! qu’on est fier d’être Français
Quand on regarde la Colonne.
Avec eux la gloire s’exile,
Osa-t-on dire des proscrits ;
Et chacun vers le champ d’asile
Tournait ses regards attendi-is.
Malgré les i-igueurs de Bellone,
La gloire ne peut s’exiler,
Tant qu’en France on verra briller
Des noms gravés sur la Colonne.
L’Europe qui, dans ma patrie.
Un jour pâlit à ton aspect,
En brisant ta tête flétrie.
Pour toi conserva du respect.
Car des vainqueurs de Babylone,
Des héros, morts chez l’étranger,
Les ombres, pour la protéger.
Planaient autour de la Colonne.
Anglais, fier d’un jour de victoire,
Par vingt rois conquis bravement,
Tu prétends, pour tromper l’histoire,
Imiter ce beau monument.
Souviens-toi donc, race bretonne :
Qu’en dépit de tes factions.
Du bronze de vingt nations
Nous avons formez la Colonne.
Et vous, qui domptiez les orages.
Guerriers, vous pouvez désormais
Du sort mépriser les outrages,
Les héros ne meurent jamais.
Nos noms, si le temps nous moissonne,
Iront à la postérité ;
Vos brevets d’immortalité
Sont burinés sur la Colonne.
Proscrits, sur l’onde fugitive
Cherchez un destin moins fatal :
Pour moi, comme la sensitive,
Je mourrais loin du sol natal !
Et si la France, un jour m’ordonne
De chercher au loin le bonheur,
J’irai mourir au champ d’honneur.
Ou bien au pied de la Colonne.