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Échos de la rue/Les Petits Vagabonds

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Une voix d’en bas — Échos de la rue
Melet (p. 249-251).

LES PETITS VAGABONDS


I


Dieu des infortunés ! quelle brume infernale
S’étend sur ce point noir de notre capitale ?
Le citadin a peine à tenir le pavé :
Par de grands coups de vent son manteau soulevé
Ne le garantit plus du froid : il court. La neige,
Qui tombe à lourds flocons, tourbillonne, l’assiège
Et l’aveugle. Nos quais sont luisants de verglas.
Le cheval essoufflé s’abat à chaque pas ;
Même dans son chemin plus d’un passant s’égare,
Tâtonne et cherche au loin la lumière d’un phare.

Qu’aperçoit-on là-bas, dans l’ombre ? Une lueur
S’élève lourdement du milieu de la place !
Ah ! c’est le feu qui prend, n’en ayons pas frayeur,
Aux menus chalumeaux d’une pauvre paillasse.


De petits vagabonds, déguenillés et noirs,
Debout, couchés, assis sur le bord des trottoirs,
Regardent tristement les rouges étincelles
Que la bise des nuits emporte sur ses ailes ;
Et de face et de dos, autour de ce brasier,
Grignotent les débris d’un pain dur et grossier.


II

Le vent est froid, deuil et torture ;
Et des enfants, ciel inhumain
Des enfants qui pour couverture
N’ont que les brumes du chemin.

Hier, ils dormaient sous des langes,
Une mère auprès d’eux veillait.
Qui donc les jeta dans nos fanges
Par ce temps, à l’heure qu’il est ?

Pressés par le besoin, sans doute,
Leurs désolés parents ont dit :
Enfants, il faut vous mettre en route.
Le pain manque à notre appétit.

Et ces glaneurs infortunés,
N’ayant trouvé ni sou ni maille,
Autour de ce grand feu de paille
Pleurent, pauvres, abandonnés !


III

Quoi bruit soudain frappe la terre,
S’approche et grossit autour d’eux ?
Pour les enfants tout est mystère,
Et ceux qui souffrent sont peureux.

Ne craignez rien, mes fils, peut-être
Est-ce la douce charité
Qui, pour vous, fait courir le prêtre
Dans les ombres de la cité ?…

Ou bien, sans doute, quelque vierge,
Et sœur du bon Vincent de Paul,
Qui, souriante sous la serge,
Vient vous ravir au froid du sol ?…

Ou bien encore la sagesse
Qui, sous la figure d’un roi,
Vient préserver votre jeunesse
Des mains brutales de la loi ?…

Plus de pleurs ! le ciel se débrouille…
Voyez sourire l’horizon…
Grand Dieu ! ce bruit, c’est la patrouille ;
Fuyez ! ou demain la prison !