Utilisateur:Lespigs/Brouillon
L'hermaphrodisme successif, ou hermaphrodisme séquentiel est une forme d'hermaphrodisme présente chez certaines espèces dont les individus acquièrent les caractères sexuels mâles et femelles à différents moments de leur vie. Il se retrouve aussi bien chez les animaux que chez les plantes, mais on préférera le terme dichogamie pour ces dernières.
Contrairement à l’hermaphrodisme simultané, la production des gamètes mâles et femelles s’effectue à deux temps distincts dans l’hermaphrodisme séquentiel. Ce mode de reproduction peut être considéré comme un intermédiaire entre le gonochorisme et l'hermaphrodisme simultané, ces derniers étant les deux extrêmes d'un même continuum[1].
Les types d'hermaphrodisme séquentiel
[modifier | modifier le code]On peut classer l’hermaphrodisme séquentiel en trois grandes tendances : la protandrie, la protogynie et l’hermaphrodisme séquentiel alternant.
Protandrie ou protérandrie
[modifier | modifier le code]Du grec ancien « andros » (homme) et « protos » (premier). Chez les espèces hermaphrodites protandres, l’individu commence sa vie reproductive en tant que mâle puis change de sexe par la suite. Les observations effectuées à ce jours suggèrent que la protandrie est le mode d’hermaphrodisme séquentiel le plus répandu dans le règne animal[2], on le retrouve chez un grand nombre d’espèces de mollusques (chez la crépidule par exemple).
Protogynie ou protérogynie
[modifier | modifier le code]Du grec « gynos » (femme) et « protos » (premier). Chez les espèces hermaphrodites protogynes, l’individu commence sa vie reproductive en tant que femelle avant de devenir mâle par la suite. Elle est très répandue dans certaines familles de téléostéens.
Alternant
[modifier | modifier le code]Les hermaphrodites séquentiels alternants ont la capacité d’effectuer plusieurs changements de sexe au cours de leur vie, ce système peut être vu comme l’intermédiaire entre l’hermaphrodisme simultané et l’hermaphrodisme alternant[1]. Ce type d'hermaphrodisme est assez rare chez les angiospermes[1] ; chez Arisaema triphyllum un individu est soit mâle soit femelle lors d’une saison reproductive et peut changer de sexe pour la saison suivante.
Règne végétal
[modifier | modifier le code]Chez la plupart des espèces de plantes à fleurs (angiospermes), les plantes sont hermaphrodites. Il est fort probable que beaucoup de traits floraux aient évolués, du moins en partie, pour surmonter les particularités associées à la cohabitation des fonctions mâles et femelle dans la même fleur.
La dichogamie en est un bon exemple : la maturation des anthères et la réceptivité des stigmates sont séparées dans le temps au sein de la fleur (à différencier de l'herkogamie, qui représente la séparation spatiale). Il existe deux formes générales de dichogamie selon l’ordre chronologique d’apparition des fonctions sexuelles.
La protandrie correspond à la déhiscence des anthères précédant la réceptivité des stigmates. Et à l’inverse la réceptivité des stigmates précédant la déhiscence des anthères est la protogynie [3].
La fréquence exacte des dichogames est inconnue mais les observations suggèrent qu'ils sont extrêmement fréquents, avec 87% d’espèces recensés sur 4277 montrant une forme de dichogamie (Bertin and Newman, 1993). Les comparaisons inter-espèces (across species) révèlent de considérables variabilités dans la mesure de la séparation temporelle de la déhiscence du pollen et de la réceptivité des stigmates, ce qui est rare dans les plantes hermaphrodites[4].
Cette forte répartition chez les Angiospermes (Bertin and Newman 1993) indique que la dichogamie doit jouer un rôle important dans la biologie florale. Cependant la fonction significative de la dichogamie reste incertaine[3].
Historique
[modifier | modifier le code]Historiquement, la dichotomie a d'abord été vu comme un mécanisme pour réduire la consanguinité (Darwin, 1862) en évitant l’autofécondation. Cependant, un sondage des angiospermes a montré que les plantes auto-incompatibles (self-incompatible, SI), qui sont incapables de consanguinité, présentent le même taux de dichogamie que les plantes auto-compatibles (Self-compatible, SC) (Bertin, 1993).
Cette observation a permis de ré-interpréter la dichogamie plus comme un mécanisme général pour réduire l’impact de l’interférence pollen-pistil sur l’import et l’export du pollen (Lloyd & Webb, 1986; Barrett, 2002). Contrairement à l’hypothèse de l’évitement de la consanguinité, qui se focalisait sur la fonction femelle, cette hypothèse d’interférence-évitement considère les fonctions des deux genres.
Répartition dans les clades
[modifier | modifier le code]L'hermaphrodisme séquentiel diffère selon les taxons :
- la protogynie est plus fréquente chez les monocotylédone et chez les espèces aquatiques et alpines[3].
- les espèces dicotylédones, par exemple les Asterideae, pratiquent plus fréquemment la protandrie.
On remarque cette différence grâce à la morphologie florale. En effet, les fleurs des espèces dicotylédones sont nettement plus grandes que les espèces monocotylédones qui ont des fleurs de taille plus réduite.
Exemples de clades[3]:
- Protogyne :
Cucurbitaceae, Datiscaceae , Coriariaceae , Anacardiaceae, Hippocastanaceae, Hammamelidae, Myrsinaceae , Dilleniaceae , Cyperaceae, Juncaceae, Anthericaceae , Araceae, Eupomatiaceae , Lauraceae , Piperaceae, Aristolochiaceae, Chloranthaceae Illiciaceae , Nymphaeaceae , Magnoliidae.
- Protandrie :
Asteridae, Rhamnaceae, Fabaceae, Passifloraceae, Butomaceae, Melastomataceae, Lythraceae, Rutaceae, Sapindaceae, Limnanthaceae, Araliaceae, Stylidiaceae, Campanulaceae, Lamiaceae, Gentianaceae, Cornaceae, Balsaminaceae, Caryoplyllaceae, Amaranthaceae, Cactacea, Frankeniaceae,Plumbaginaceae, Santalaceae, Menispermaceae, Bromeliaceae, Orchidaceae, Melanthiaceae.
Morphologie
[modifier | modifier le code]L’alternance des fonctions reproductrices mâle et femelle chez les plantes peuvent se faire sur le plan intra ou interfloral. Généralement, les plantes "niveau interfloral" ont une tendance vers la protogynie, et inversement, la protandrie est plus fréquente lors d’un changement intrafloral[5].
Facteurs influant sur l'évolution de la dichogamie
[modifier | modifier le code]Sélection du sexe-ratio
[modifier | modifier le code]Du point de vue évolutif, la dichogamie présente un casse-tête supplémentaire. La sélection fréquence-dépendante cause au sexe rare dans la population d'avoir l'avantage de la fitness, le sexe ratio de la population devrait alors évoluer vers un investissement égal mâle et femelle. Mais la dichogamie génère des sex-ratio inégaux durant une saison de floraison.
En conséquence la dichogamie peut diminuer la probabilité de transfert du pollen à la fleur. Ce décalage entre le temps et la disponibilité du pollen et des ovules au niveau de la population devrait contre sélectionner la dichogamie[4].
Dépression de consanguinité
[modifier | modifier le code]La dichogamie a été décrite comme un mécanisme pour éviter l’autopollinisation. L'auto-fécondation est avantageux pour la fitness, car elle permet de transmettre plus de copies de ses gènes aux générations suivantes. Cependant, si les gamètes possèdent une fitness inférieur aux autres plantes, cet avantage de la transmission devient négatif. Ce phénomène de baisse de fitness pour les générations suivantes suite à la reproduction entre apparentés est appelé dépression de consanguinité (indreeding depression).
Une explication de ce phénomène est que les allèles délétères sont souvent partiellement ou complètement récessives et que leurs effets délétères sont combinés dans les descendants homozygotes des consanguins. Le rôle exacte de la dépression de consanguinité dans l'évolution de la dichogamie n'est pas claire, en effet certaines études ont montrées un lien entre la dépression de consanguinité et la réduction de l’autofécondation dans les espèces dichogames, alors que d'autres n'ont trouvés aucunes évidences de cette relation[4].
Réduction de l'interférence sexuelle
[modifier | modifier le code]La dichogamie est considéré comme un mécanisme d'évitement de l'auto-fécondation, permettant de favoriser les croisements et, particulièrement chez les plantes auto-incompatibles (self-incompatible, SI), de réduire l'interférence sexuelle. Cependant la protandrie incomplète, qui garantie presque que la moitié du pollen puisse être exporté avec succès sans interférence avec les stigmates, indique que la dichogamie pourrait faciliter le succès pollinisateur des mâles. Mais aucune différence dans la fitness des femelles n'est détectée sous l'augmentation ou la diminution expérimentale de l'interférence sexuelle.
Ces résultats suggèrent que la dichogamie est presque dirigée par l'avantage de la fitness des mâles et que le peu de différence dans la fitness des femelles sous les variations des niveaux d'interférence sexuelle indiquent que la fonction des mâles est plus apte à jouer un rôle dans la formation des traits floraux que de réduire l'interférence sexuelle[6].
Protandrie/Protogynie et les modes de pollinisation (Abiotique/Biotique)
[modifier | modifier le code]Des études comparatives au niveau des espèces ont montrées que les espèces protandres avaient tendance à être pollinisé par des abeilles et mouches (pollinisation biotique) contrairement aux espèces protogynes qui tendaient à être pollinisé par le vent (pollinisation abiotique) et les scarabées (pollinisation biotique) et celles fécondées par les coléoptère ou celles servant de refuge ou piege pour insectes.Ceci suggère un rôle fonctionnel de la pollinisation dans l’évolution de la dichogamie.
Un sondage général des Angiospermes (Bertin and Newman, 1993) a révélé que la protandrie prévaut sur la protogynie et que la protandrie est plus commune dans les systèmes de pollinisation biotique alors que la protogynie est plus commune dans les systèmes anémophiles (pollinisation par le vent). La prévalence de la protandrie est cohérente avec l’hypothèse que l’évolution de la protogynie est sujette au développement contraint, car il requiert un retour arrière dans l’ordre habituel du développement des organes floraux (Waller, 1988)[7].
Modèles évolutifs de la dichotomie
[modifier | modifier le code]Le développement d’un modèle de population génétique pour examiner l’influence des facteurs de l’évolution de la dichogamie indique que l’interférence anthères-stigmates peu favoriser la dichogamie même en absence de dépression de consanguinité. Même si l’interférence anthère-stigmates et la dépression de consanguinité sont les forces clefs conduisant l’évolution initiale de la dichogamie.
De plus, la sélection pour synchroniser le moment de la dispersion du pollen avec le moment de disponibilité des ovules, au niveau de la population, devient une force plus puissante, opposant la future évolution de la dichogamie, plutôt que l’augmentation de la séparation temporelle.
Les corrélations écologiques de la protandrie et de la protogynie sont difficiles à interpréter, car ces traits ont une forte association avec certaines familles de plante. Dans plusieurs cas, une forme de dichogamie apparait être la caractéristique d’une famille entière, par exemple la protogynie est plus commune que la protandrie chez les Monocotylédones. Donc l’utilisation de la phylogénie pour mettre en évidence des corrélations entre mode de pollinisation et type de dichogamie permettrait de confirmer l’existence de telles associations[7].
Modèle Markovien du test de vraisemblance de Pagel: Programme Discrete
[modifier | modifier le code]Un test qui utilise le maximum de vraisemblance pour estimer le taux instantané d’évolution entre les combinaisons d’états (formes dichogames en association avec les modes de pollinisation). La méthode estime le taux de transition entre traits avec 2 états discrets utilisant le modèle de Markov.
L’utilisation du programme Discrete pour tester la direction des transitions entre protandrie, protogynie et adichogamie (hermaphrodisme simultané) et entre les modes de pollinisation (abiotique et biotique) ainsi qu’une introduction à une nouvelle application de ce programme, permet de tester les hypothèses que les modes de pollinisation conduisent l’évolution de la dichogamie plutôt que la dichogamie conduit l’évolution des mode de pollinisation[7].
L’association entre dichogamie et pollinisation semble être le produit d’une convergence évolutive plutôt qu’un artefact de la parenté phylogénétique. Les tests ont révélés que les modes de pollinisation chez les angiospermes étaient corrélés évolutivement avec les types de dichogamie (évolution non indépendante). Plus spécifiquement les espèces qui sont abiotiquement pollinisé par le vent sont plus à même d’être protogynes (pour prévenir l’auto-fécondation) alors que les espèces biotiquement pollinisées serait protandres.
Une explication de ce résultat est que les espèces protogynes sont peut-être moins susceptibles que les espèces protandres de souffrir de l'augmentation de l'auto-fécondation par une interruption de l’anémophilie (pollinisation par le vent)[7].
Limite du modèle
[modifier | modifier le code]Une limite de ce modèle est que le test a été effectué en assumant que les traits n'affectaient pas les taux de spéciation ou d’extinction. Cependant, l’anémophilie est associée aux espèces avec moins de diversité que la pollinisation biotique[7].
Modèle de maximum de vraisemblance de Pagel
[modifier | modifier le code]Modèle incluant la sélection du sexe-ratio, l'interférence anthère-stigmates et la dépression de consanguinité
[modifier | modifier le code]Le Modèle
[modifier | modifier le code]Un modèle qui permet d’explorer les importances relatives de chaque facteur de l’évolution de la dichogamie (la sélection du sexe-ratio, l’avantage intrinsèque de l’auto-fécondation, la dépression de consanguinité et l’interférence anthère-stigmates).
Dans ce modèle est examiné les conditions sous lesquelles la dichogamie a envahie une population de plantes hermaphrodites diploïdes avec des fleurs bisexuées et à générations annuelles (discrètes et non chevauchantes)[4].
Les hypothèses confirmées par le modèle
[modifier | modifier le code]- La dépression de consanguinité joue un rôle dans l’évolution de la dichogamie, de même pour d’autre type de reproduction végétal.
- L’interférence anthère-stigmates joue un rôle important dans l’évolution de la dichogamie (même en absence d’auto-fécondation). Étayé par le fait que la dichogamie ait évoluée et c’est maintenue dans des espèces auto-incompatibles.
En général, le modèle a pu déterminer que l’évolution de la dichogamie dépend de l‘équilibre de ses avantages (la réduction de production de consanguins et la diminution de l'interférence anthère-stigmates) et de ses désavantages (perte de fitness par auto-fécondation des ovules et la production asymétrique de sexe ratio à différents moments)[4].
Évolution de la dichotomie supposant une fonction Gaussienne
[modifier | modifier le code]Stratégie Evolutivement Etable (E.S.S.)
[modifier | modifier le code]Règne animal
[modifier | modifier le code]Répartition dans les clades
[modifier | modifier le code]Au sein du règne animal, l'hermaphrodisme séquentiel n'est pas une caractéristique inhérente de clades majeurs (ou de grands groupes monophylétiques). Par comparaison, 5 à 6% des animaux présentent des cas d'hermaphrodisme contre 90% chez les végétaux.
On retrouve ce type de sexualité à la fois chez les animaux terrestres et chez les animaux aquatiques. Cependant les espèces terrestres utilisant ce type de reproduction sont très peu nombreuses (ou alors non connues) et ne représentent qu'un très faible pourcentage en comparaison de celles que l'on peut trouver dans le monde aquatique.
L'hermaphrodisme est rare en eau fraîche (peu ou pas de poissons étudiés et acceptés comme présentant de l'hermaphrodisme séquentiel), cependant il est courant vers les récifs de corail (exemple du poisson Thalassoma bifasciatum qui vit dans les récifs de corail et qui se caractérise par un hermaphrodisme séquentiel de type protogyne).
On retrouve couramment des cas d'hermaphrodisme séquentiel chez l'embranchement des Pancrustacés (cas d'Isopodes), chez certains poissons téléostéens, chez les Annélides polychètes et oligochètes (exemple du lombric). On constate des cas d'hermaphrodisme séquentiel au niveau de l'embranchement des Eutrochozoaires spiraliens illustrés par les plathelminthes et par les mollusques : gastéropodes (exemple de la limace) et prosobranches. Les Métazoaires type spongiaires sont également sujets à ce type d'hermaphrodisme.
L'étude de la diversité des types d'hermaphrodisme chez les Métazoaires montre clairement qu'il n y a pas de frontière définie entre l'hermaphrodisme simultané et l'hermaphrodisme séquentiel.
L'hermaphrodisme alternant est difficile à mettre en évidence car il nécessite une observation sur le long terme au niveau individuel ainsi qu'une analyse histologique.
Les raisons du changement de sexe sont explicables par la théorie via des modèles mais pas prévisible au sein du vivant, c'est pour cette raison qu'il n'y a pas plus de cas d'hermaphrodisme séquentiel apparaissant dans d'autres taxons. Une autre explication est que l'hermaphrodisme séquentiel est beaucoup plus répandu que supposé mais il reste néanmoins difficile à détecter.
Avantages évolutifs
[modifier | modifier le code]L'allocation sexuelle et la plasticité phénotypique sont les caractéristiques majeures de l'hermaphrodisme et sans aucun doute ses avantages adaptatifs principaux.
Modèle size/age-advantage
[modifier | modifier le code]Cas de la protandrie, de la protogynie et de l'hermaphrodisme alternant[8][1].
[modifier | modifier le code]Le modèle 'Size Advantage' soutient que le changement de sexe serait favorisé s'il y a un avantage à devenir d'un sexe particulier à un moment donné de la vie selon des paramètres comme l'âge ou la taille de l'individu concerné.Ce modèle reste viable pour expliquer la direction et le moment du changement de sexe chez la plupart des animaux.
Ce modèle est une étude de cas pour des populations suffisamment denses pour lesquelles mâles comme femelles ont du mal à trouver un partenaire pour se reproduire, ou dans le cas où la perte de variabilité génétique due à la consanguinité ou à la reproduction en groupe isolé n'est pas un problème. Ce modèle essaye de montrer comment les motifs de comportement de reproduction peuvent faire suite à une interaction des caractéristiques de survie, de fécondité et de comportements reproducteurs pour produire une situation où l'individu hermaphrodite a un avantage reproducteur plus important qu'un non hermaphrodite.
Pour le cas de la protandrie : le changement de sexe devient avantageux quand le succès reproducteur des mâles est trop faible pour rester avantageux: donc les individus mâles lors de leur premier cycle de vie vont avoir tendance à devenir des femelles. Les mâles produisent la même quantité de gamète quelque soit leur taille et les gamètes femelles étant beaucoup plus gros, la fécondité des femelles dépend de leur taille.
Pour le cas de la protogynie : les individus d'abord femelles ont un succès reproducteur qui devient stable une fois une certaine taille atteinte, donc les individus vont changer de sexe afin d'optimiser leur succès reproducteur tout en augmentant leur taille. En exemple de protogynie favorisée: les poissons récifaux: le mâle dominant est le plus gros des individus et contrôle un harem de femelles, lorsqu'il meurt la plus grosse femelle change de sexe et prend sa place. Dans ce cas, seuls les individus les plus gros peuvent avoir un succès reproducteur important en tant que mâles, les plus petits n'ont aucun intérêt à être des femelles pour assurer leur succès reproducteur et éviter la compétition mâle/mâle.
Les avantages évolutifs liés à l'hermaphrodisme alternant sont illustrés au travers de l'exemple de l'huître : les individus sont des femelles au début de la reproduction puis leurs gonades deviennent des gonades mâles et produisent du sperme pendant la période de "gestation" des œufs fertilisés, puis redeviennent des gonades femelles pour produire des oeufs quand les précédents ont éclos. Le succès reproducteur de la femelle est limité par la taille de la chambre de gestation.
Comment le comportement reproducteur, la structure d'age, la période de fécondité de la femelle interagissent pour produire la pression de sélection pour l'hermaphrodisme séquentiel ? La sélection pour l'hermaphrodisme séquentiel peut exister, si le fait de passer une partie de sa vie mature en tant que mâle et une autre partie en tant que femelle, donne lieu à un potentiel reproducteur plus élevé que celui attendu pour les non hermaphrodites. L'action isolée de la sélection, pour augmenter la production de zygote dans la population au travers de l'hermaphrodisme, pourrait produire un sex-ratio avec une majorité de femelles. Les mâles ont donc, dans ce cas, un potentiel reproducteur élevé.
Une hypothèse est que les différences entre mâles et femelles en terme de fécondités spécifiquement liées à l'âge ne sont pas aussi importantes que celles calculées à partir des populations modèles. Par conséquent la pression de sélection en faveur de l'hermaphrodisme séquentiel pourrait être faible voir non existante. Dans le cas où la fécondité des femelles reste relativement constante d'âge en âge, il n'y a donc pas de sélection pour l'hermaphrodisme si la population se reproduit au hasard.
Quand la fécondité des femelles augmente avec l'âge, tous facteurs taille-avantage ont tendance à rendre similaires les courbes de fécondité des mâles et des femelles et vont minimiser la sélection pour l'hermaphrodisme. Même pour les espèces où l'avantage lié à la taille est opérateur, les jeunes ou petits mâles sont parfois capables de se reproduire. Par conséquent, dans une population où il y a un certain succès reproducteur des jeunes mâles, la fécondité des mâles aux stades jeunes est assez élevée pour minimiser la pression de sélection pour changer de sexe. Un inconvénient certain pour la protogynie est que le seul type de modèle reproducteur avantageux est celui où les femelles choisissent un partenaire du même âge ou plus âgé. Le taux de croissance de l'individu est un paramètre important à considérer dans l'hermaphrodisme séquentiel, mais la palette des âges est un paramètre plus pratique et offre une évolution temporelle pour l'histoire sexuelle de l'individu moyen.
Autres facteurs influençant le changement de sexe[9]
[modifier | modifier le code]Dans le règne animal, le changement de sexe, qui s'accompagne d'un changement de comportement, peut être programmé génétiquement et lié à l’âge de l’individu. Les facteurs environnementaux peuvent également, dans certains cas, provoquer le changement de sexe. Il peut également être dû à des problématiques de sex-ratio au sein d'une population. L'hermaphrodisme séquentiel se développe donc au cours de l'évolution si l'avantage d'un changement de sexe évolue avec l'âge ou la taille. L'individu doit avoir la capacité de passer d'un sexe à l'autre après différenciation aux premiers stades de la vie. Mais le changement de sexe reste un phénomène relativement rare chez les animaux. Les individus ont donc du faire évoluer leur capacité à changer de sexe quand il y a stimulation de certains facteurs exogènes indiquant une transformation pour être adapté à ce moment précis.
En effet certaines études ont montré que la transformation d'hermaphrodites simultanés au statut de mâle secondaire (exemple de Rivulus marmoratus) est fortement déterminée par le génotype mais aussi quelque peu affectée par des conditions environnementales comme la température aux stades précoces du cycle de vie. Le changement plutôt brusque, soit en âge de sexe-ratio soit en taille-spécifique de sexe-ratio connu pour plusieurs espèces hermaphrodites, va dans le sens d'un facteur génétique pour le temps ou la taille de la transformation. Cependant, d'autres études (exemple de Anthias squamipinnis ou de Labroides dimidiatus) indiquent que les femelles changent de sexe en réponse à un manque de mâles à proximité.
Pour donner un exemple simple prenons le cas de Thalassoma bifasciatum.
C'est un petit poisson qui vit territorialement au niveau de récifs. Selon la taille du récif, il peut être présent un ou plusieurs mâles pour un harem de femelles. Il se caractérise par un hermaphrodisme séquentiel de type progynie. Pour qu'un mâle puisse se reproduire et protéger son territoire, il doit être d'une taille importante. Ainsi pour les autres individus de la population, la stratégie optimale consiste à commencer la vie comme femelle, croître jusqu'à une taille importante qui lui permette de gagner des combats, et ainsi de changer de sexe une fois à cette taille. Quand un mâle territorial meurt, la femelle la plus grande change de sexe et obtient ainsi le territoire qui s'accompagne du statut de mâle dominant.
Les différences en croissance et en taux de mortalité des sexes jouent également un rôle moteur dans l'hermaphrodisme séquentiel. Donc si un sexe a un taux de mortalité plus élevé, cela sera un avantage d'être du sexe opposé. Au contraire, si un sexe a un taux de croissance plus élevé, il sera plus avantageux d'être de ce sexe en premier lieu. Il y a des avantages évolutifs à être un hermaphrodite séquentiel. La capacité à changer de genre en réponse aux pressions biologiques ou environnementales fait des hermaphrodites séquentiels des individus bien plus flexibles et capables de faire face à des situations qui pourraient conduire à une baisse de population voir à une extinction.
La plupart des recherches sur l'hermaphrodisme séquentiel implique du travail descriptif de la distribution des sexes au sein d'une espèce ou traite de l'endocrinologie du sexe. Plusieurs théories ont été établies mais il est cependant dur de savoir comment un tel mécanisme pourrait évoluer et arriver à se maintenir au sein des générations.
Modèle d’optimisation : la théorie des constantes sans dimensions
[modifier | modifier le code]Le modèle d’optimisation proposé par Charnov et Skuladottir permet de prédire, à partir de paramètres connus, à quel moment (âge ou taille) le changement de sexe devrait intervenir chez un individu hermaphrodite[10].
On considère qu’une espèce est caractérisée par les paramètres suivants : (K /M), αM et δ (avec K le taux de croissance relative, M le taux de mortalité instantanée chez les adultes, α l’âge de la première reproduction et δ le coefficient de relation entre la fertilité des mâles et la taille).
Si ces paramètres sont similaires chez plusieurs espèces, alors on considère que le ratio (L50/Lmax) (soit la taille pour laquelle 50% de la population est du second sexe divisé par la taille maximale) ainsi que le ratio (τ /α) (l’âge du changement de sexe divisé par l’âge de la première reproduction) sont des constantes identiques chez ces mêmes espèces. En d’autre terme, les individus de ces espèces changeront de sexe à une proportion constante de leur taille maximale et à un multiple d’âge constant de l’âge de leur maturité sexuelle[10].
Cette théorie a été testée empiriquement sur 52 espèces de poissons protogynes et protandres, et les résultats ont permis d’estimer que le changement de sexe intervenait pour une taille de 80% la taille maximum et pour un âge correspondant à 2,5 fois l’âge de la maturité[10]. Cette étude, bien que concluante, ne permet pas de dire si ce modèle est applicable à l’ensemble des espèces hermaphrodites séquentielles.
Hypothèse d'apparition de l'hermaphrodisme séquentiel
[modifier | modifier le code]La répartition de l’hermaphrodisme dans le règne animale est encore mal comprise, néanmoins certaines hypothèses se proposent d’expliquer l’apparition des différents types de sexualités au sein de certains clades. Une étude portant sur les crustacés suggère que l’hermaphrodisme séquentiel serait un hermaphrodisme secondaire issu du gonochorisme[2]. Dans cette hypothèse, l’hermaphrodisme simultané est considéré comme le type de sexualité ancestrale dont est issu le gonochorisme[2]. Des conflits génétiques liés à la détermination du sexe seraient ensuite apparus chez des individus gonochoriques, causés par des mutations ou des insertions de séquences parasites influant sur ces gènes de déterminations et créant un délai dans l’expression de ceux-ci, d’où la succession chronologique des phases sexuelles chez les hermaphrodites séquentiels[2].
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Catégorie:Sexualité animale Catégorie:Reproduction Catégorie:Botanique
Notes et Références
[modifier | modifier le code]- (en) Janet L. Leonard, « Williams' Paradox and the Role of Phenotypic Plasticity in Sexual Systems », sur Integrative and Comparative Biology,
- (en) Pierre Juchault, « Hermaphroditism and gonochorism. A new hypothesis on the evolution of sexuality in crustacea », sur Comptes rendus de l'Académie des sciences,
- (en) Risa D. Sargent, Mohammad A. Mandegar and Sarah P. Otto, « A model of the evolution of dichogamy incorporating sex ratio selection anther-stigma interference and inbreeding depression », sur Evolution,
- (en) Robert I. Bertin,Christian M. Newman, « Dichogamy in angiosperms », sur The Botanical Review,
- (en) Can Dai,Laura F. Galloway, « Do dichogamy and herkogamy reduce sexual interference in a self-incompatible species? », sur Functional Ecology,
- (en) Risa D. Sargent and Sarah P. Otto, « A phylogenetic analysis of pollination mode and the evolution of dichogamy in angiosperms », sur Evolutionary Ecology Research,
- (en) Robert R. Warner, « The adaptive significance of sequential hermaphroditism in animals », sur The American Naturalist,
- (en) Robert R. Warner, « Sex change and the size-advantage model », sur Trends in Ecology and Evolution,
- (en) D.J. Allsop & S.A. West, « Constant relative age and size at sex change for sequentially hermaphroditic fish », sur Journal of Evolutionary Biology,