Guillaume Liberge de Granchain
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Officier de marine |
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Marie-Émilie de Liberge (d) |
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Guillaume Jacques Constant de Liberge de Granchain ( à Granchain - à Granchain) est un amiral de France. Issu d'une famille noble de Normandie, entré dans la marine royale à 13 ans, il participa notamment à la Guerre d'Indépendance américaine et fit office de plénipotentiaire entre les Anglais et les Américains en vue des pourparlers de paix. Il a servi la France durant 35 ans, naviguant sur 21 vaisseaux différents.
Sa famille
[modifier | modifier le code]La famille Liberge est mentionnée dans les grand rôles de l’Échiquier de Normandie en 1180 à Caen[1] puis au début du XVe siècle en la paroisse Saint-Germain de Lisieux[2]. Dès la fin du XVIe siècle, les Liberge possèdent les fiefs des Prandes à Giverville et du Moulin-Noël à Bernay, usent de qualificatifs nobles et exercent les charges de vicomtes de Plasnes et d’Échanfray à Notre-Dame-du-Hamel ainsi que de Montreuil et Bernay.
François II Liberge (? ca 1612 - Grandchain ), seigneur de Granchain, vicomte baillivial et juge criminel ès vicomtés de Plasnes et d’Échanfray jusqu’à 1653 au moins, frère servant en la charité de Sainte-Croix de Bernay en 1653-1654, est anobli par lettres patentes données en septembre 1649 par le jeune roi Louis XIV et enregistrées en la Cour des Aides de Normandie à Rouen le [3], qui lui confèrent pour armoiries : « de gueules, à une croix d’hermine, l’escu timbré d’un casque d’argent taré de profil orné de ses lambrequins d’argent doublés de gueules et cimé d’un lion issant d’or, ledit escu supporté par deux lions du mesme mouvant d’une terrasse de sinople ». Écuyer, licencié ès-lois, il exerce la charge de sénéchal de la baronnie de Bernay le .
De Marie-Magdeleine II de Hanivel de Saint-Laurent, qu’il a épousée le en l’église paroissiale Saint-Éloi de Rouen, François II Liberge a au moins 3 enfants, lesquels ont tout d’abord renoncé à la qualité de nobles lors de la recherche commencée en 1666[4].
Aïeul de l’amiral, François-Robert Ier de Liberge, écuyer, seigneur et patron de Granchain en 1701 et 1716, épouse le , en l’église paroissiale Saint-Pierre de Granchain[5], noble damoiselle Marie-Paule de Guiry († âgée de 60 ans puis inhumée le dans le chœur de l’église de Granchain), dame de La Buctière aux Jonquerets-de-Livet, fille de François de Guiry, écuyer, sieur de La Buctière, et de son épouse damoiselle Marie-Paule Maurey.
Enfin, fils des précédents et donc père de l'amiral, François-Guillaume de Liberge (Grandchain - ), écuyer, seigneur et patron de Granchain en 1729 et 1751, gendarme de la garde du roi Louis XV[6], épouse noble damoiselle Marie, Anne, Émilie de Mauduit de Carentonne-Sémerville, originaire de Bernay, sœur des capitaines de vaisseau Constant et André de Mauduit. De cette alliance naissent sept enfants : André Ier (1741), Marie-Émilie-Constance-Victoire (1742), Guillaume-Jacques-Constant (1744), Marie-Robert-Henri (1745), Marie-Élisabeth (1746), André II (1747) et enfin Marie-Adélaïde-Adrienne (1749)[7].
Toutes les archives de l'amiral ont été remises par ses descendants au Musée de la marine.
Un fonds est aussi conservé aux archives nationales sous la côte 764 AP[8].
Son enfance
[modifier | modifier le code]Guillaume-Jacques-Constant de Liberge de Granchain nait le dimanche et est baptisé le lendemain en l’église paroissiale Saint-Pierre de Granchain. Il est le filleul de messire Jacques de Liberge, écuyer, sieur de La Buctière, et de noble dame Geneviève, Constance, Félicité de Mauduit, épouse de messire Georges, Jacques, Adrien Le Portier, écuyer, sieur de Saint-Ouen, ancien officier des Chevau-Légers, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, de la paroisse d’Orbec. Élève doué, il subit l'influence de ses deux oncles Mauduit, officiers de marine, et dans une moindre mesure d'un vieux capitaine de vaisseau, M. d'Argence, qui habite près du manoir de son père à Granchain ; il choisit ainsi la Marine et entre le en la compagnie des Gardes-Marines de Brest, n'ayant pas atteint l'âge de 13 ans. On l'appelle alors Granchain-Sémerville, en souvenir de ses oncles marins.
Ses premiers faits de guerre
[modifier | modifier le code]Le , Granchain-Sémerville embarque à bord de la frégate L'Émeraude commandée par le lieutenant Taillevis de Périgny sur lequel il connaît son premier combat naval le , contre Le Southampton. Relevé parmi les blessés des Anglais, il est débarqué en Angleterre le et, en tant que prisonnier, il est assigné à résidence à Launceston en Cornouailles, où il reste quatorze mois. Libéré sur parole, il rejoint la Normandie pour y exécuter la fin de sa détention. Compris dans un échange de prisonniers le , il est finalement dégagé de sa parole d'honneur et il retourne à Brest où il reprend son poste de garde-marine. Il y côtoie et se lie d'amitié avec de futurs hommes célèbres, dont Jean-François de Galaup, comte de la Pérouse et Jean-Jacques de Marguerie. Sous-brigadier en 1760, il est promu successivement brigadier en 1775, chef de brigade en 1778, lieutenant en premier en 1779 et lieutenant-colonel en 1780.
Sa deuxième campagne de guerre a lieu le , sur Le Sphinx, commandé par le chevalier de Coutance. Le , Granchain-Sémerville prend part à bord du même bâtiment à la Bataille des Cardinaux dans la baie de Quiberon où la flotte anglaise manque de l'emporter sur la flotte française si Le Sphinx n'avait pas trouvé refuge dans l'embouchure de la Vilaine où il va demeurer jusqu'à son désarmement, le . Le , Granchain-Sémerville embarque sur Le Palmier qui désarme à Brest le suivant. Le , il embarque à Brest sur la flûte La Normande pour l'île de Saint-Domingue. Il n'est de retour à Brest que le . Le , il embarque sur Le Solitaire, sous le commandement de Arzac de Ternay, afin de surveiller les Anglais à la sortie de La Manche, jusqu'au , puis sur la flûte L'Adour, du au , pour protéger les navires de commerce.
Au décès de son père, le , Guillaume de Liberge prend les titres de seigneur et patron de Granchain. Le , il reprend son service à Brest et embarque sur la corvette La Lunette commandée par Armand-Guy-Simon de Coetnempen, comte de Kersaint, jusqu'à son désarmement le . Le , il embarque à nouveau sur L'Adour, en compagnie de La Pérouse, pour aller chercher du bois en Espagne. Au lendemain de leur retour, qui a lieu le , il embarque sur une gabarre nommée La Dorothée, qui ne revient à Brest que le . Son oncle, Constant de Mauduit, appelé au commandement de la frégate La Blanche, lui propose de le servir comme second. Ils appareillent du Havre le pour les Antilles et ne sont de retour à Brest que le .
Sa première mission scientifique sur La Flore
[modifier | modifier le code]Le , Granchain-Sémerville devient membre de l'Académie royale de marine. Sous le commandement de Jean-René de Verdun de la Crenne, il embarque comme astronome-géographe adjoint sur la frégate la Flore, pour un voyage scientifique. Cette expédition, organisée par l'Académie des sciences, a pour but de tester de nouveaux chronomètres et instruments pour améliorer la mesure des longitudes en mer. Le scientifique Jean-Charles de Borda, officier en second, l'astronome et chanoine Alexandre-Gui Pingré, et le peintre Nicolas Ozanne, sont du voyage. Partie de Brest le , La Flore fait escale à Cadix, Madère, Tenerife, Gorée, Praia, Fort-de-France, Saint-Pierre, Roseau, Basse-Terre, Saint John's, Montserrat, Barbade, Saint-Christophe-et-Niévès, Saint-Eustache, Saba, Saint Barthélemy, Saint-Martin, Anguilla, Saint-Domingue, Acklins, les Bermudes, Terre-Neuve, Saint-Pierre-et-Miquelon, Patrixfjord et Sudroë. Le , La Flore atteint les côtes norvégiennes, franchit le Cattégat pour mouiller à Elseneur puis à Copenhague. Après avoir exploré la Baltique, La Flore visite la mer du Nord, les Shetland, les côtes écossaises et anglaises avant de rejoindre Dunkerque le . Il termine son périple à Brest le . À son bord, les horloges de Ferdinand Berthoud ont résisté au voyage et ont conservé l'isochronisme avec celles restées à Brest pendant quatorze mois, avec un décalage de quatre ou cinq secondes seulement. Cette mission est un succès et, en récompense, Granchain-Sémerville reçoit du roi Louis XV un sextant.
La guerre d'indépendance des États-unis
[modifier | modifier le code]Granchain-Sémerville participe à la guerre d'indépendance des États-Unis de 1778 à 1781, à la bataille d'Ouessant le , à la bataille de Chesapeake le , servant en 1778-1779 sur L’Annibal, en l’escadre d’Orvilliers, puis sur Le Saint-Esprit et Le Duc de Bretagne en 1780. Le , il représente Paul Barras à la capitulation de Cornwallis. Le même Barras écrit à son propos : « Il est infiniment au-dessus des éloges que je pourrais vous en faire. Le service du roi gagnera à le faire capitaine »[9]. Actif à la prise de Saint-Christophe, Granchain-Sémerville est alors major général de l'escadre rassemblée à Cadix en 1782 pour faire plier Londres en menaçant la Jamaïque. Chevalier des ordres de Saint Louis et de Cincinnatus (USA) en 1778, il est nommé capitaine de vaisseau du Roi en 1782.
Sa carrière en France
[modifier | modifier le code]Granchain-Sémerville participe en 1782 à la refonte du port du Havre qui devint l'un des plus importants et florissants du monde. Grand navigateur du XVIIIe siècle, il commande la frégate La Nymphe en 1784 et part faire respecter les droits des pêcheurs français à Terre-Neuve. Ce grand marin est aussi un savant-géographe et on lui doit la description des parages de Terre-Neuve, au voisinage de laquelle une île porte son nom. En 1784, le ministre de la Marine lui demande de se joindre à La Fayette de retour en Amérique. Il l'accompagne chez George Washington et le ramène en France sur sa frégate La Nymphe. Il commande l'Escadre de Brest en 1786.
Son parcours pendant la Révolution française
[modifier | modifier le code]Quand éclate la Révolution française, Constant de Liberge est seigneur et patron de Granchain depuis 23 ans, et major de l'escadre de Charles de Ternay depuis un an. Il fait partie des gentilshommes du bailliage secondaire de Beaumont-le-Roger qui comparaissent à l'Assemblée Générale de l'ordre de la noblesse du grand bailliage d'Évreux qui se tient le en la cathédrale d'Évreux, pour l'élection des députés aux États généraux de 1789[10].
De novembre 1790 à décembre 1791, il est chargé par le nouveau pouvoir de la direction des Ports et Arsenaux de France. Il est élu, le 5 ventôse an IV, associé non résidant de la deuxième classe (Sciences morales et politiques) de l’Institut national des arts, des sciences et des lettres, dans la section Géographie et statistique. En 1797, il intègre une commission chargée d'étudier un projet de descente en Angleterre.
La Classe des sciences morales ayant été supprimée le 3 pluviôse an XI, un arrêté du 8 pluviôse an XI répartit les membres de l’Institut entre quatre classes : Sciences physiques et mathématiques ; Langue et littérature françaises ; Histoire et littérature ancienne ; Beaux-Arts. Constant de Liberge de Grandchain est alors nommé correspondant de la première classe (Sciences physiques et mathématiques).
Le 30 prairial an XIII, Guillaume Jacques Constant de Liberge de Granchain s'éteint dans son château dont lui-même avait contribué à dessiner les plans entre ses voyages et qu'il avait fait construire dans le style Louis XVI entre 1783 et 1785 par l'architecte bernayen Jacques Fresnel (1755-1803). Il est alors inhumé sous un mausolée encore visible au cimetière de Granchain.
Postérité
[modifier | modifier le code]Granchain-Sémerville avait épousé le au château de Sémerville sa cousine germaine Marie, Françoise, Amélie de Mauduit de Carentonne-Sémerville (Le Havre - Grandchain ). Veuve, cette dernière - que les villageois surnommaient « la bienfaitrice du pays d'Ouche » - qu'on croyait morte revint à la vie alors qu'on était prêt à l'inhumer. La carrière de Granchain-Sémerville est évoquée sur la plaque de marbre apposée sur le mur nord du château de Granchain :
«
A la mémoire de
Guillaume Jacques Constant
De Liberge de Granchain
Capitaine des vaisseaux du Roi
Membre de l'Institut
Chevalier des ordres
De St Louis et de Cincinatus
Né à Granchain le 9 février 1744
Combat de l'Emeraude
12 septembre 1757
Bataille d'Ouessant
27 juillet 1778
Bataille de la Chesapeak
16 mars 1787
Expédition de Terre-Neuve
Septembre 1784»
Au total, Granchain-Sémerville aura servi la France durant 35 ans, naviguant sur 21 vaisseaux différents, prenant part à 16 campagnes en mer (dont 7 en temps de guerre) et participant à 6 combats navals. Il a laissé la réputation d'un homme d'une brillante intelligence, d'une grande droiture et toujours estimé de ceux qui l'entouraient, marins ou paysans. C'est un grand nom du panthéon français du siècle des Lumières.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, 2e série, 5e volume, tome XVe de la collection (année 1846), Paris : Derache ; Caen : Hardel, et Rouen : Le Brument, 1846, p. 17.
- Cf. Thomas Basin (1412-1490), évêque et comte de Lisieux (1447-1474), Histoire des règnes de Charles VII et de Louis XI, tome IVe, Jules-Étienne Quicherat (pub.), Paris : J. Renouard, 1859, p. 206.
- Registre mémorial 34, folio 219.
- Abbé Adolphe de Bouclon, curé de Sacquenville, Étude historique sur la marine de Louis XVI. Liberge de Granchain, capitaine des vaisseaux du roi, major d’escadre, directeur général des ports et arsenaux…, Évreux : Auguste Hérissey, 1866, p. 17.
- Les consentements furent reçus par Pierre de Liberge, prêtre, curé de Moyaux.
- L'état des officiers du Roi tués, blessés ou prisonniers à la bataille de Todenhaufen (1er août 1759) publié en page 435 du recueil des Gazettes de France fait état d'un Granchain blessé au visage au sein du régiment de Vastan
- Registres paroissiaux de Saint-Pierre de Grandchain, microfilms 8 Mi 2051 (1646-1719) et 8 Mi 2052 (1720-1792), Archives départementales de l'Eure, Évreux.
- <<[1]
- D'après Christian de La Jonquière, Les marins français sous Louis XVI. Guerre d’indépendance américaine, Issy-les-Moulineaux : Muller, p. 124.
- Louis de La Roque et Édouard de Barthélemy, Catalogue des gentilshommes de Normandie qui ont pris part ou envoyé leur procuration aux assemblées de la noblesse pour l’élection des députés aux États-Généraux de 1789, Ire livraison, Paris : E. Dentu et Auguste Aubry, 1864, p. 85.
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Abbé Adolphe de Bouclon, Étude historique sur la marine de Louis XVI. Liberge de Granchain, capitaine des vaisseaux du roi, Évreux : Auguste Hérissey, 1866 (ouvrage fouillé mais donnant une généalogie largement erronée des Liberge, d'après un mémoire domestique complaisant fourni par les Deshayes, barons de Forval, et depuis conservé aux archives départementales du Calvados).
- Pierre Cinquabre, « Guillaume Liberge, seigneur et châtelain de Granchain, capitaine des vaisseaux du roi (1774 - 1805) », Châteaux et châtelain en Normandie, Cahiers Léopold Delisle TX.L-1991, Limeil-Brévannes, Société parisienne d'histoire et d'archéologie normande, 1994.
- Bernard Lizot, « Le château de Granchain », in Connaissance de l'Eure, no 147.
- Biographie de Liberge de Granchain, in Rouen lecture, no 117.
Article connexe
[modifier | modifier le code]Liens externes
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- Ressource relative à la recherche :
- Académie de marine : Liberge de Granchain de Sémerville
- Naissance en février 1744
- Naissance dans la province de Normandie
- Membre de l'Académie américaine des arts et des sciences
- Membre de l'Académie de marine
- Militaire français de la guerre d'indépendance des États-Unis
- Navigateur français du XVIIIe siècle
- Ordre de Cincinnatus
- Décès en juin 1805
- Décès dans l'Eure
- Décès à 61 ans