Lettre anonyme
Une lettre anonyme est une lettre non signée envoyée à un ou plusieurs destinataires, souvent dans le but de nuire à une réputation, voire d'exercer une menace[1],[2] (notamment une menace de mort ou un chantage).
Description
[modifier | modifier le code]Historique
[modifier | modifier le code]Terminologie
[modifier | modifier le code]Au début des années 1920, en pleine affaire de Tulle, le criminaliste Edmond Locard crée le terme d’« anonymographe » pour désigner les auteurs de lettres anonymes[3],[4]. Dans cette affaire, l'anonymographe est une femme, Angèle Laval, qui signe ses lettres « L'Œil de tigre ». Un journaliste du Matin, venu couvrir le procès de l'accusée, la décrit sur les bancs du tribunal en ces termes dans son édition du :« Elle est là, petite, un peu boulotte, un peu tassée, semblable sous ses vêtements de deuil[5], comme elle le dit elle-même, à un pauvre oiseau qui a replié ses ailes. »[6]. Si le journaliste n'emploie pas le mot « corbeau », la description fait penser à cet oiseau.
Après que l'affaire a fait l'objet d'une adaptation cinématographique en 1943 par Henri-Georges Clouzot — dans laquelle les lettres sont signées « Le Corbeau » — l'appellation corbeau remplace le mot « anonymographe » dans le langage courant. Le vocable corbeau est par exemple largement employé dans le cadre de l'affaire Grégory[7],[3]».
Affaires de lettres anonymes
[modifier | modifier le code]- L'affaire du corbeau (1917-1922), 110 lettres anonymes à Tulle, pour laquelle Angèle Laval fut condamnée en 1922.
- L'affaire Grégory, plusieurs lettres anonymes envoyées à la famille Villemin entre 1981 et 1984 évoquant des secrets de famille, la dernière reçue le mercredi est venue revendiquer le meurtre du petit Grégory.
- L'affaire Kulik, après la réception par le parquet d'une lettre anonyme dénonçant un témoin susceptible de savoir des choses sur Willy Bardon[8], la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Amiens reporte sa décision de traduire devant un jury le violeur et meurtrier présumé de la jeune femme[9].
- Le cas Lucien Léger, surnommé « l'étrangleur » à cause de la signature « L'étrangleur no 1 » apposée au bas des lettres anonymes envoyées à la police.
Dans la culture populaire
[modifier | modifier le code]Littérature
[modifier | modifier le code]- Dans Rouerie et Le Pardon (1882), deux nouvelles de Guy de Maupassant.
- Dans Alice et le Médaillon d'or (1934) de Mildred Wirt Benson.
- Dans La Plume empoisonnée (1942) d'Agatha Christie.
- Dans La Possibilité du Mal (1965), nouvelle de Shirley Jackson.
Cinéma
[modifier | modifier le code]- Dans La Lettre anonyme (1909) de Louis Feuillade.
- Dans The Rosary (1915) de Colin Campbell.
- Dans Poison Pen (en) (1939), de Paul L. Stein.
- Dans Le Corbeau (1943) d'Henri-Georges Clouzot.
- Dans The Barber (2001) des frères Coen.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « Définition de « lettre anonyme », sur Reverso.fr (consulté le )
- « Dictionnaire de l'Académie Française, article « Lettre », section III », sur CNRTL.fr (consulté le )
- « Corbeaux : qui se cache derrière les lettres anonymes dans les affaires criminelles ? - France Bleu », sur ici par France Bleu et France 3, (consulté le )
- Philippe Artières, « Représentations et pratiques sociales de l’écriture anonyme fin de siècle », Sociétés & Représentations, vol. 1, no 25, (DOI 10.3917/sr.025.0157, lire en ligne, consulté le ).
- Sa mère est morte noyée dans un étang, sa fille Angèle Laval étant soupçonnée de l'y avoir aidée.
- Le corbeau : Histoire vraie d'une rumeur. Du tigre au corbeau, p. 193.
- « Faits divers: d'où vient le terme «corbeau». », Le Parisien, 16 juin 2017.
- J.Cl. avec Jean-Marc Ducos, « Affaire Kulik : une lettre anonyme repousse la décision d’un renvoi aux assises », Le Parisien, (lire en ligne, consulté le ).
- De notre envoyé spécial Jean-Marc Ducos à Amiens (Somme), « Affaire Kulik : Willy Bardon, confondu par sa voix, renvoyé devant les assises », Le Parisien, (lire en ligne, consulté le ).
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Jean-Yves Le Naour, Le Corbeau, histoire vraie d'une rumeur, Hachette Littératures, 2006, (ISBN 2-01-2359-582)