Tell Tuneinir
Tell Tuneinir Thannuris | ||
Localisation | ||
---|---|---|
Pays | Syrie | |
Coordonnées | 36° 25′ 19″ nord, 40° 52′ 00″ est | |
Superficie | 40 hectares | |
Histoire | ||
Époque | 2700 av. J.-C. - XVe siècle apr. J.-C. | |
Géolocalisation sur la carte : Syrie
| ||
modifier |
Tell Tuneinir (également orthographié Tunaynir ou Touneynir) est un site archéologique du nord-est de la Syrie. Il date du début du troisième millénaire avant J.-C. et présente des signes d'habitation continue jusqu'au début du XVe siècle après J.-C., avec des périodes datant du début de l'Empire byzantin, quand la ville était appelée Thannuris (Thannourios), et pendant la période musulmane ayyoubide.
Site, historique
[modifier | modifier le code]Tell Tuneinir se trouve sur la rive orientale de la rivière Khabour, à 15 km au sud-est d'Hassaké (Al-Hasakah)[1], et s'étend sur une superficie de 40 hectares[2]. Il se compose d'un monticule central de 18,2 mètres de haut, entouré par la ville basse[3].
Période préhistorique
[modifier | modifier le code]La première occupation du tell remonte à la période dite « ninivite V », vers 2700 av. J.-C.[2]. Les artéfacts de l'âge du bronze découverts sont notamment différents types de poterie, des outils en os, des figurines d'animaux en argile représentant des moutons, des chèvres et des chevaux, ainsi que deux autres formes en argile, dont l'une a la forme d'un astragule et l'autre la forme d'une robe, ils se rapportent donc aux produits animaux et à la fabrication textile[2].
La fonction d'exploitation agricole est démontrée et mise en évidence par la présence de tessons décorés représentant des animaux en train de paître[2]. En 2000 avant J.-C., la région connaît un fort dépeuplement, et de nombreux sites n'ont jamais été réoccupés, mais Tell Tuneinir n'est pas affecté par le phénomène, des poteries et un sceau cylindrique découverts sur le site démontrent qu'il reste habité tout au long du deuxième et du premier millénaires avant J.-C.[4]
Période romaine
[modifier | modifier le code]Lorsque le Khabur devient la rivière marquant la frontière entre l'Empire romain et son rival l'Empire parthe, au premier siècle avant J.-C., Tell Tuneinir évolue d'une petite localité agricole vers une ville importante[4]. L'ala prima nova Diocletiana, une unité auxiliaire d'archers à cheval locaux, est stationnée dans la région entre Tell Tuneinir, alors nommée Thannuris, et Horaba (actuel Tell Ajaja)[5].
Selon l'historien du VIe siècle Procope de Césarée, il existe deux villes portant le nom de Thannourios[6]. L'empereur byzantin Justinien Ier (régnant en 527-565) décide de fortifier Thannuris, mais la première tentative de ce type échoue, car l'armée byzantine dirigée par Bélisaire est vaincue lors de la bataille de Thannuris par les Perses sassanides[7]. Finalement, les efforts des Byzantins sont couronnés de succès et la ville devient une forteresse redoutable pour protéger la région des raids sassanides[6]. Mais les Perses prennent la forteresse en 587, à un moment où elle était apparemment restée sans défense[7].
Période islamique
[modifier | modifier le code]Au début de la période islamique, Tell Tuneinir devient une petite ville[4]. En 1401, les armées de Tamerlan prennent et détruisent la ville[2]. À l'époque ottomane, les semi-nomades bédouins montent leurs tentes le long du canal Durin[8], et Tell Tuneinir devient le centre d'imposition de ces nomades. Un bâtiment militaire ottoman et des sépultures sont découverts sur le site[9].
Société
[modifier | modifier le code]À la fin du Moyen Âge, la population de la ville se compose de musulmans parlant arabe et de chrétiens syriaques[10] ; les syriaques manifestent une forte continuité culturelle tout au long de l'ère islamique, des périodes omeyyade et abbasside à la période ayyoubide, ce qui se concrétise avec l'utilisation continue de l'église de la ville depuis le VIe siècle jusqu'au XIIe siècle[1].
Fouilles
[modifier | modifier le code]Le Britannique Austen Henry Layard explore le site en 1853 dans le cadre de son étude générale de la vallée du Khabur. Deux autres études sont menées ensuite, la première par Friedrich Sarre et Ernst Herzfeld en 1911, et la deuxième par l'archéologue et jésuite Antoine Poidebard en 1934 ; ces études fournissent des cartes des sites[11].
En 1977-1978, le site est étudié par Wolfgang Röllig et Hartmut Kühne puis par Jean-Yves Monchambert en 1983 et 1984[11]. Les projets syriens de construction du barrage d'Al-Basil sur le Khabur menacent de nombreux sites archéologiques[2] ; à la demande de la direction générale syrienne des antiquités et des musées, le St. Louis Community College forme une équipe dirigée par Michael et Neathery Fuller pour évaluer le site en 1986[12].
Les fouilles commencent l'année suivante en 1987[13]. Le barrage est achevé en 1997, d'autres fouilles sont prévues en fonction des précipitations[2]. Le site est fouillé pour la dernière fois en 2004[13].
Notes et références
[modifier | modifier le code]Références
[modifier | modifier le code]- Fuller 1994, p. 259.
- Fuller et Fuller 1998, p. 69.
- Crowley, Gorokhoff et Lucore 1986, p. 59.
- Fuller et Fuller 1998, p. 70.
- Dodgeon et Lieu 1994, p. 292, 345.
- Kennedy et Riley 2004, p. 119.
- Comfort 2009, p. 326.
- Hole et Smith 2004, p. 217.
- Qaddur, Fuller et Fuller 1998, p. 815.
- Fuller et Fuller 1998, p. 74.
- Fuller 1996, p. 129.
- Fuller et Fuller 1988, p. 279.
- Eger 2015, p. 148.
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- (en) Anthony Martin Comfort, Roads on the frontier between Rome and Persia: Euphratesia, Osrhoene and Mesopotamia from AD 363 to 602 (thèse), University of Exeter, (hdl 10036/68213, lire en ligne).
- Archaeological Fieldwork Opportunities Bulletin, Archaeological Institute of America, , 6e éd. (ISSN 1061-8961).
- Frank Hole et Ronald Smith, Land Change Science: Observing, Monitoring and Understanding Trajectories of Change on the Earth's Surface, Springer, (ISBN 978-1-4020-2562-4), « Arid Land Agriculture in Northeastern Syria ».
- David Kennedy et Derrick Riley, Romes Desert Frontiers. From the Air, Taylor & Francis, (1re éd. 1990) (ISBN 978-1-135-78269-6).
- Michael H Dodgeon et Samuel N. C Lieu, The Roman Eastern Frontier and the Persian Wars AD 226-363: A Documentary History, Routledge, (1re éd. 1991) (ISBN 978-1-134-96113-9).
- Michael H Dodgeon et Samuel N. C Lieu, The Roman Eastern Frontier and the Persian Wars AD 226–363: A Documentary History, Routledge, (1re éd. 1991) (ISBN 978-0-415-10317-6).
- A. Asa Eger, The Islamic-Byzantine Frontier: Interaction and Exchange Among Muslim and Christian Communities, vol. 34, I.B.Tauris, coll. « Library of Middle East History », (ISBN 978-1-780-76157-2).
- (en) Michael Fuller et Neathery Fuller, « Tell Tuneinir on the Khabur: Preliminary Report on Three Seasons », Damas, Direction Générale des Antiquités et des Musées, vol. 37-38, (ISSN 0570-1554).
- (en) Michael Fuller, « Continuity and Change in the Syriac Population at Tell Tuneinir », Aram Society for Syro-Mesopotamian Studies. Peeters Publishers, vol. 6: Cultural Interchange during the Umayyad Era in Bilad al-Sham, no 1&2, (ISBN 978-90-429-2943-2, ISSN 0959-4213).
- (en) Michael Fuller et Neathery Fuller, « Archaeological Discoveries at Tell Tuneinir, Syria », Assyrian Academic Society, vol. 12, no 2, (ISSN 1055-6982).
- (en) William F. Spengler, Wayne G. Sayles et Michael Fuller, Turkoman Figural Bronze Coins and their Iconography, vol. II: The Zengids, Clio's Cabinet, (ISBN 978-1-879-08004-1), « Artuqid, Zengid and Ayyubid coins from Tell Tuneinir, Syria ».
Liens externes
[modifier | modifier le code]