Chanson de sainte Foy d'Agen
La chanson de sainte Foy d'Agen (Cançon de santa Fe) est un des plus anciens textes littéraires en occitan, composé à la fin du XIe siècle.
Le romaniste Joan Coromines le qualifie de « monument initial de la langue d'oc »[1]. L'historien Frédéric de Gournay y voit un « poème primordial » dont la dernière partie « anticipe le style des chansons de geste »[2].
Martí de Riquer voyait dans la chanson de sainte Foy le plus ancien texte littéraire en catalan, tandis que pour Robert Lafont c'est le plus ancien texte littéraire en occitan.[réf. nécessaire]
L'œuvre
[modifier | modifier le code]Le poème compte 593 octosyllabes rimés. Il conte la vie de sainte Foy, jeune fille d'Agen, son martyre en l'an 303, et le châtiment qui frappa ses tortionnaires : Dacien, Dioclétien et Maximien[2].
Il figure dans un seul manuscrit, conservé à Leyde[3], et fut édité pour la première fois par José Leite de Vasconcelos (pt) en 1902[4].
La langue est archaïque ; par exemple, le titre du poème s'écrirait dans cette langue Canczon de sainta Fed. Il est remarquable que le nom de Foy n'apparaisse qu'une seule fois dans la chanson, sous la forme latine Fides, au vers 72.
Date et provenance
[modifier | modifier le code]La datation du poème le situe entre 1060 et 1100. La patrie du poète anonyme a fait l'objet de plusieurs hypothèses : la région de Narbonne, « sous toutes réserves » (selon son éditeur Antoine Thomas)[5], la Cerdagne ou plutôt l'abbaye de Cuxa en Conflent (Hoepffner et Alfaric), Conques et le Rouergue (Denis Grémont[6], André Soutou[7])... Les isoglosses du dialecte de la Chanson ont conduit Ernest Nègre à désigner une région allant d'Agen à Saint-Pons-de-Thomières, et centrée sur le Tarn[8]. Pour Frédéric de Gournay, le poète, lié à l'abbaye de Conques, aurait composé la Chanson pour un auditoire pyrénéen, peut-être à Morlaàs[2]. Quant à Robert Lafont, il voit dans le dialecte du poème une « langue du Chemin », liée à l'influence de l'abbaye de Conques en Navarre. Le poète ferait partie de l'entourage de Pierre d'Andouque, ancien moine de Conques originaire du nord de l'Albigeois, devenu évêque de Pampelune de 1082 à 1114[9].
L'auteur serait un laïc et un aristocrate s'adressant aux moines de sainte Foy de Conques, peut-être dans un prieuré proche des Pyrénées[10].
Éditions et traductions
[modifier | modifier le code]- La Chanson de Sainte Foi d'Agen : poème provençal du XIe siècle, édition d'après le manuscrit de Leyde avec fac-similé, traduction, notes et glossaire par Antoine Thomas, Champion, 1925 ; réédition 1974. En ligne sur Gallica
- La Chanson de sainte Foy, Ernest Hoepffner et Prosper Alfaric, Les Belles-Lettres, 1926, 2 tomes.
- La Chanson de Sainte Foi : texte occitan du XIe siècle, édité, traduit, présenté et annoté par Robert Lafont, Genève, Droz, 1998.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (ca) Joan Coromines, Onomasticon Cataloniae : els noms de lloc i noms de persona de totes les terres de llengua catalana, t. II, Barcelone, Curial Edicions, , 502 p. (ISBN 84-7256-889-X), p. 212
- Frédéric de Gournay, « Un poème primordial : la Chanson de sainte Foy », Patrimòni, no 109, , p. 31-32.
- conservé à la Bibliothèque universitaire de Leyde
- Romania, t. 31, 1902, p. 177-200
- Antoine Thomas, La chanson de sainte Foi d'Agen, Champion, 1925, introduction, p. xxxviii.
- Denis Grémont, « Le culte de Ste-Foi et de Ste-Marie-Madeleine à Conques au XIe siècle d'après le manuscrit de la Chanson de Ste-Foi », Revue du Rouergue, vol. XXIII, , p. 165-175.
- André Soutou, « Localisation géographique de la Chanson de sainte Foy », Annales du Midi, vol. 82, , p. 109-122.
- Ernest Nègre, « Le dialecte de la Chanson de sainte Foy », Actes du XIIIe Congrès international de linguistique romane, Québec, , p. 341-347.
- Robert Lafont, La chanson de sainte Foi, Genève, Droz, , p. 18, p. 36-42.
- Frédéric de Gournay, « Relire la Chanson de sainte Foy », Annales du Midi, vol. 107, no 212, , p. 388-390, 396-398.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Frédéric de Gournay, « Relire la Chanson de sainte Foy », Annales du Midi, t. 107, octobre-, p. 385-399. En ligne sur le site Persée.
- Denis Grémont, « Le culte de Ste-Foi et de Ste-Marie-Madeleine à Conques au XIe siècle d'après le manuscrit de la Chanson de Ste-Foi », Revue du Rouergue, t. 23, 1969, p. 165-175.
- Ernest Nègre, « Le dialecte de la Chanson de sainte Foy », Actes du XIIIe Congrès international de Linguistique romane, Québec, 1971, p. 341-347.
- André Soutou, « Localisation géographique de la Chanson de sainte Foy », Annales du Midi, t. 82, 1970, p. 109-122.
- Michel Zink, « Autour de la Chanson de sainte Foy et de Bernard d'Angers : réflexions sur la naissance de la poésie romane », Etudes Aveyronnaises, 2013, p. 285-298.