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Capitaine Nemo

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Capitaine Nemo
Personnage de fiction apparaissant dans
Vingt Mille Lieues sous les mers et dans
L'Île mystérieuse.

Juché sur le Nautilus, le capitaine Nemo calcule la latitude grâce à son sextant. Gravure d'après un dessin d'Alphonse de Neuville.
Juché sur le Nautilus, le capitaine Nemo calcule la latitude grâce à son sextant.
Gravure d'après un dessin d'Alphonse de Neuville.

Alias Prince Dakkar
Origine Inde
Décès Île Lincoln, Océan Pacifique Sud
Sexe Masculin
Espèce humain

Créé par Jules Verne
Romans Vingt Mille Lieues sous les mers
L'Île mystérieuse

Le capitaine Nemo (du latin nemo qui peut se traduire par « personne ») est un personnage de fiction créé par Jules Verne dans le roman Vingt Mille Lieues sous les mers. Il en est le personnage principal en tant que commandant du sous-marin Nautilus. Il est aussi l'un des personnages secondaires de L'Île mystérieuse et réapparaît sous les traits de Maître Volsius dans la pièce Voyage à travers l'Impossible.

Présentation

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Personnage savant, ingénieur de génie, le capitaine Nemo est un homme sombre et mystérieux, qui cache sa véritable identité derrière une allusion à l'épisode d'Ulysse et Polyphème dans l'Odyssée (Ulysse, pour échapper au cyclope lui donne un faux nom : Οὖτις / Oûtis qui se traduit par « Personne » en grec ancien tout comme « Nemo » en latin dans le sens « pas un homme », « aucun homme »[1]). Hanté par un passé traumatique, il a renoncé à la société des hommes et écume les mers dans un esprit de recherche scientifique et technique (les multiples explorations auxquelles se livre le Nautilus), de justice (son aide aux révolutionnaires grecs) et de destruction (son implacable extermination des navires battant un certain pavillon, jamais nommé dans Vingt Mille Lieues sous les mers). Dans ce dernier rôle, Nemo est un terroriste rongé de remords.

Son histoire est dévoilée dans L'Île mystérieuse : il est le prince Dakkar, fils d'un râja indien et neveu de Tipû Sâhib (personnage réel). Épris de science et de culture occidentale tout en gardant son identité indienne, il voue une haine féroce à la Grande-Bretagne depuis la mise en esclavage de son peuple et le meurtre de sa femme et de ses enfants. Après la révolte des Cipayes, il se résout à mettre à exécution les plans du Nautilus, à l'origine prévu comme vaisseau d'exploration, dans le plus grand secret, sur une île déserte. Il se met dès lors à écumer les mers avec un équipage tout dévoué, de toutes les nationalités.

Dans la première version de Vingt Mille Lieues sous les mers, Nemo était un aristocrate polonais qui désirait venger sa famille détruite pendant la répression russe de l'insurrection polonaise de 1861-1864[2]. L'éditeur de Verne, Pierre-Jules Hetzel, craignant la censure du livre sur le marché russe et d'offenser ainsi l'Empire russe, rendit obscurs le passé et les motifs de Nemo[3].

À noter qu'il a longtemps été considéré que l'éditeur était intervenu également dans la fin du capitaine Nemo. Comme l'écrit le biographe Jean-Paul Dekiss, cet homme que Jules Verne avait rendu inaccessible aux hommes et à tout culte religieux, aurait dû expirer avec le mot « indépendance ». Le manuscrit original avait été modifié, supposément par Hetzel, avec les mots « Dieu et Patrie »[4], ce qui rendait différente sa personnalité initiale. Toutefois, il est prouvé aujourd'hui, grâce à l'accès aux manuscrits, que ce changement est de la main même de Jules Verne[5].

Le capitaine Nemo trouve sa fin, avec le Nautilus, dans la destruction de l'« île Lincoln » à la fin de L'Île mystérieuse.

Néanmoins, le capitaine Nemo est évoqué avec nostalgie dans une note figurant dans Le Sphinx des glaces, afin de se souvenir que les membres de l'équipage de l’Halbrane n'étaient pas les premiers à débarquer au Pôle Sud :

« Vingt-huit ans plus tard, ce que M. Jeorling n’avait pu même entrevoir, un autre l’avait vu, un autre avait pris pied sur ce point du globe, le 21 mars 1868. La saison était plus avancée de sept semaines, et l’empreinte de l’hiver austral se gravait déjà sur ces régions désolées que six mois de ténèbres allaient bientôt recouvrir. Mais cela importait peu à l’extraordinaire navigateur dont nous rappelons le souvenir. Avec son merveilleux appareil sous-marin, il pouvait braver le froid et les tempêtes. Après avoir franchi la banquise, passé sous la carapace glacée de l’océan Antarctique, il avait pu s’élever jusqu’au 90e degré. Là, son canot le déposa sur un sol volcanique, jonché de débris de basalte, de scories, de cendres, de laves, de roches noirâtres. À la surface de ce littoral pullulaient les amphibies, les phoques, les morses. Au-dessus volaient des bandes innombrables d’échassiers, les chionis, les alcyons, les pétrels gigantesques, tandis que les pingouins se rangeaient en lignes immobiles. Puis, à travers les éboulis des moraines et des pierres ponces, ce mystérieux personnage gravit les raides talus d’un pic, moitié porphyre, moitié basalte, à la pointe du pôle austral. Et, à l’instant où l’horizon, juste au nord, coupait en deux parties égales le disque solaire, il prenait possession de ce continent en son nom personnel et déployait un pavillon à l’étamine brodée d’un N d’or. Au large flottait un bateau sous-marin qui s’appelait Nautilus et dont le capitaine s’appelait le capitaine Nemo. »

À la demande d'Hetzel, Édouard Riou s'inspira d'une photographie du colonel Charras pour ses illustrations de la grande édition illustrée de Vingt Mille Lieues sous les mers (1871)[6]. Charras (1810-1865) était un ami d'Hetzel et un farouche partisan de la république.

Postérité

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Le personnage de bande dessinée créé en 1905 par Winsor McCay, Little Nemo in Slumberland, doit son nom au personnage créé par Jules Verne, tout comme Nemo, le petit poisson-clown du long-métrage d'animation des Studios Pixar Le Monde de Nemo (2003).

Le roman Némoville, Ottawa, Beauregard,  Fac-similé disponible sur Wikisource Télécharger cette édition au format ePub Télécharger cette édition au format PDF (Wikisource) d’Adèle Bourgeois fait apparaître le Nautilus après les évènements de L'Île mystérieuse.

Nemo fait partie des personnages réunis par Alan Moore dans la bande dessinée La Ligue des gentlemen extraordinaires (et son adaptation cinématographique) ; son origine indienne y est mise en relief. De même, le capitaine Nemo est l'un des personnages de la série d'animation japonaise Nadia, le secret de l'eau bleue de 1990-1991 et un des personnages principaux, avec le Pr Aronnax, de la mini-série de bande-dessinée de Richard D. Nolane et Patrick A. Dumas, 20 000 siècles sous les mers (2010), L'Horreur dans la Tempête (Tome 1). Ce dernier est une « suite » à Vingt Mille Lieues sous les mers organisant un crossover entre l'univers de Jules Verne et celui de H. P. Lovecraft[7].

Il apparaît dans un album pour enfants, Robin et les Pirates, illustré par Adelchi Galloni, sur un texte d'Ermanno Libenzi, publié chez Fernand Nathan, en 1974.

Filmographie

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Les interprètes du personnage Nemo ou capitaine Nemo au cinéma et à la télévision

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Projets inaboutis

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Discographie

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L'astéroïde (1640) Nemo, découvert en 1951, est nommé en son honneur[12].

Notes et références

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  1. Lexique français-latin (1900) par Édouard Sommer, Louis Marie Quicherat et Émile Chatelain. Ouvrage disponible sur le site d'Internet Archive.
  2. Site julesverne.nantesmetropole.fr/, dossier "Jules Verne et la Pologne
  3. Christian Chelebourg. Préface de Vingt Mille Lieues sous les mers. Livre de Poche. Page VII. 1990. En fait, c'est Verne qui écrit à Hetzel : « Mais écartons le Polonais et le Russe. Le lecteur supposera qui il voudra, suivant son tempérament. » (Lettre du 11 juin 1869). Correspondance de Jules Verne et de Pierre-Jules Hetzel. Tome I. Slatkine. 1999.
  4. « Qui était vraiment Jules Verne », sur lexpress.fr via Wikiwix, (consulté le ).
  5. Voir le manuscrit sur Gallica [1].
  6. Volker Dehs, « Nemo, Flourens et quelques autres - Divagations autour de Vingt Mille Lieues sous les mers », Verniana, Jules Verne Studies - Études Jules Verne, vol. 3, 2010–2011, p.11–32. (ISSN 1565-8872).
  7. [2]
  8. [3]
  9. "Nemo" de Christophe Gans Histoires de tournages | DevilDead
  10. Nemo (Christophe Gans, 1995) | Mobilis in Mobile
  11. Casemate magazine, 2014
  12. (en) « (1640) Nemo », dans Dictionary of Minor Planet Names, Springer, (ISBN 978-3-540-29925-7, DOI 10.1007/978-3-540-29925-7_1641, lire en ligne), p. 130–130

Bibliographie

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  • François Angelier, Dictionnaire Jules Verne : mémoire, personnages, lieux, œuvres, Paris, Pygmalion, , 1196 p. (ISBN 2-85704-870-X).
  • (en) Christopher Evans, « Engineering the past : Pitt Rivers, Nemo and The Needle », Antiquity, vol. 80, no 310,‎ , p. 960-969 (DOI 10.1017/S0003598X00094540).
  • (en) Leonidas Kallivretakis, « Jules Verne's Captain Nemo and French Revolutionary Gustave Flourens : A Hidden Character Model ? », The Historical Review / La Revue historique, Institut de recherches néohelléniques, vol. I,‎ , p. 207-243 (lire en ligne)I&rft.pages=207-243&rfr_id=info:sid/fr.wikipedia.org:Capitaine Nemo">.
  • Claude Lengrand, Dictionnaire des Voyages extraordinaires, Amiens, Encrage, coll. « Travaux / Cahier Jules Verne » (no 33), , 318 p. (ISBN 2-906389-95-1, présentation en ligne sur le site NooSFere).
  • (en) Mike Perschon, « Finding Nemo : Verne’s Antihero as Original Steampunk », Verniana — Jules Verne Studies / Études Jules Verne, vol. 2,‎ 2009–2010, p. 179–194 (lire en ligne).
  • Peter Schulman, « Autour de l'excentricité de Phileas Fogg et du Capitaine Nemo », Bulletin de la Société Jules Verne, no 123,‎ , p. 33-36 (ISSN 0986-2226).
  • (en) David K. Vaughan, « The Image of the Engineer in the Popular Imagination, 1880-1980 », Bulletin of Science, Technology & Society, vol. 10, nos 5-6,‎ , p. 301-304 (lire en ligne).

Articles connexes

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Liens externes

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