Assignation à résidence en France
En France, l'assignation à résidence est l'injonction faite à une personne physique de résider en un lieu déterminé.
L'assignation à résidence peut résulter d'une décision civile (assignation à résidence d'un étranger), d'une décision pénale ou d'une décision administrative.
Par l'autorité judiciaire
modifierL’assignation à résidence est prononcée par l’autorité judiciaire dans deux cas.
La détention à domicile sous surveillance électronique peut être décidée par la juridiction de jugement lorsqu'elle prononce une peine égale ou inférieure à six mois d'emprisonnement. La détention à domicile sous surveillance électronique peut également être prononcé par un juge de l'application des peines après le jugement[1],[2],[3].
L'assignation à résidence avec surveillance électronique peut être ordonnée, dans le cadre d'une procédure de convocation par procès-verbal ou de comparution immédiate (donc présumées innocentes), avec l'accord ou à la demande de l'intéressé, par le juge d'instruction ou par le juge des libertés et de la détention si la personne mise en examen encourt une peine d'emprisonnement correctionnel d'au moins deux ans ou une peine plus grave[4],[5].
Par l'autorité administrative
modifierDans d’autres cas l’assignation à résidence est prononcée par l’autorité administrative :
- Selon le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l’assignation à résidence, pour des étrangers non-européens en instance d'éloignement (elle même pouvant résulter d’une obligation de quitter le territoire ou d’une Interdiction judiciaire du territoire) dans l’impossibilité de quitter le territoire français ou de regagner son pays d’origine ou de rendre dans aucun autre pays, est décidée le préfet de département[6],[7]. Cette disposition existe depuis l’ordonnance de 1945 sur l'entrée et le séjour des étrangers[8] et a été modifiée à de nombreuses reprises.
- Selon la loi du sur l’état d'urgence, sa déclaration donne pouvoir au ministre de l’Intérieur de prononcer l’assignation à résidence, dans le lieu qu’il fixe, de toute personne « à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics ». La durée maximale de l’assignation à résidence est de douze mois. Au-delà, une prolongation est possible sous certaines réserves[9],[10].
- Selon le code de la sécurité intérieure modifié par la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, le ministre de l’Intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation une personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics de ne pas se déplacer à l’extérieur d’un périmètre géographique déterminé, se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, déclarer son lieu d’habitation et tout changement de lieu d’habitation. Ces obligations sont prononcées pour une durée maximale de trois mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées[11].
Application
modifierEn 2016, 46 assignations à résidence sur le fondement d’une interdiction judiciaire du territoire ou d’un arrêté d’expulsion ont été prononcées[12].
Constitutionnalité des mesures
modifierÀ l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par l'avocat de Kamel Daoudi, le Conseil constitutionnel décide en décembre 2017 d'une censure partielle des dispositions encadrant les assignations à résidence pour les étrangers : si celles-ci peuvent être illimitées, elles ne peuvent dépasser 12 heures par jour et le lieu d'assignation doit tenir compte « du temps passé sous ce régime et des liens familiaux personnels noués par ce dernier », ce qui ouvrirait la porte à un rapprochement géographique de Kamel Daoudi de sa famille[13],[14]. Le Conseil constitutionnel estime que la loi modifiant le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aurait dû prévoir qu’« au-delà d’une certaine durée », l’administration soit tenue de « justifier de circonstances particulières imposant le maintien de l’assignation » afin de protéger du risque d'« une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et de venir[14] ». Si le Conseil constitutionnel rappelle « aucune règle de valeur constitutionnelle n’assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d’accès et de séjour sur le territoire national », l'assignation à résidence d’un étranger peut donc être « sans limite dans le temps » pour « éviter que puisse librement circuler sur le territoire national une personne non seulement dépourvue de droit au séjour, mais qui s’est également rendue coupable d’une infraction ou dont la présence constitue une menace grave pour l’ordre public. Cette mesure est ainsi motivée, à un double titre, par la sauvegarde de l’ordre public ». Toutefois, il assortit cette durée indéfinie de restrictions afin qu'elle ne puisse être assimilée à une mesure de privation de liberté en limitant l'assignation au domicile à 12 heures par jour et en précisant que le lieu d'assignation doit être déterminé en fonction « du temps passé sous ce régime et des liens familiaux et personnels noués par ce dernier ». L’effet de la censure de la loi est reporté au , le temps que le Parlement puisse la corriger[14],[15].
Références
modifier- « Le placement sous surveillance électronique », sur justice.gouv.fr,
- Article 132-26-1 du code pénal
- Article 723-7 du code de procédure pénale
- « Bracelet électronique dans le cadre d'une assignation à résidence », sur Service-public.fr, (consulté le )
- Article 142-5 du code de procédure pénale
- « Assignation à résidence d'un étranger en instance d'éloignement », sur service-public.fr, (consulté le )
- Article L561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- Article 28 de l’ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France.
- Article 6 de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence
- Conseil constitutionnel, décision no 2017-624 QPC du 16 mars 2017
- Articles L228-1 et suivants du code de la sécurité intérieur, créés par l’article 3 de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme
- « Étude d’impact du projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif »
- Agence France-Presse, « Droit des étrangers en France: le Conseil constitutionnel recadre les assignations à résidence », lepoint.fr, (consulté le )
- Jean-Baptiste Jacquin, « Le Conseil constitutionnel autorise les assignations sans fin pour les étrangers », lemonde.fr, (consulté le )
- Conseil constitutionnel, décision no 2017-674 QPC du 1er décembre 2017
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifier- Interdiction de séjour en France
- Placement sous surveillance électronique en France
- Centre de rétention administrative en France (pour les étrangers qui font l’objet d’une décision d’éloignement)
- Contrôle judiciaire en droit français (pouvant limiter la liberté de se déplacer pour les personnes mises en examen)
- Détention provisoire en France (pour les personnes mises en examen)