Alphonse Boudard

écrivain français

Alphonse Boudard, né le à Paris et mort le à Nice (Alpes-Maritimes), est un romancier et scénariste français.

Alphonse Boudard
Description de cette image, également commentée ci-après
Alphonse Boudard dans les années 1980.
Nom de naissance Pierre Michel Boudon
Naissance
Paris 15e
Décès (à 74 ans)
Nice (Alpes-Maritimes)
Nationalité Drapeau de la France France
Activité principale
Distinctions
Auteur
Langue d’écriture Français
Genres

Après s'être engagé dans la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale, il sombre dans la délinquance et découvre la littérature en prison. À l'âge de trente-trois ans, il publie des romans et des nouvelles écrits dans une langue drue, nourrie de l'argot et du langage populaire[1],[2]. Certaines de ses œuvres sont adaptées au cinéma et il travaille lui-même sur le scénario de nombreux films, qui sont pour la plupart des films policiers ou de gangsters.

Biographie

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Enfance et entrée dans la Résistance

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Né d'un père inconnu et d'une mère courtisane et souvent absente[3], Alphonse Boudard est élevé dans une famille de paysans en pleine forêt d'Orléans puis récupéré à l’âge de sept ans par sa mère qui le confie à sa grand-mère parisienne[4] ; il découvre alors le 13e arrondissement prolétaire[5]. Après avoir obtenu son certificat d'études, il devient apprenti dans une fonderie typographique en 1941.

Confronté à la Seconde Guerre mondiale, il entre dans la Résistance en rejoignant un maquis dans le centre de la France en 1943. En 1944, il participe à la Libération de Paris au sein d'un groupe FFI puis intègre les troupes du colonel Fabien dont il fait le portrait dans Le Corbillard de Jules.

Il quitte les « Fabiens », pour rejoindre les commandos de France de la 1re armée du maréchal de Lattre. Blessé au combat à Colmar lors de la campagne d'Alsace, il est décoré de la Croix de guerre 1939-1945[6],[7],[8]. Il dénonce dans ses livres les résistants de la dernière heure acclamant Charles de Gaulle après avoir planqué le portrait de Philippe Pétain, ainsi que les épurateurs sauvages au passé « pactisant »[9].

Premiers séjours en prison

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Après la guerre, Alphonse Boudard raconte avoir continué à fréquenter les bordels militaires de campagne (thème qu'il évoque dans son livre sur les maisons closes[10]), vit de petits boulots et traficote[11]. Il glisse lentement mais sûrement vers les cambriolages. Plusieurs séjours en prison et sanatorium pour soigner sa tuberculose le conduisent à écrire des livres comme La Cerise et L'Hôpital.

Mais son premier livre, écrit en prison, n'est pas publié car jugé trop long (huit cents pages)[12]. Il le réécrit plus tard sous le titre Les Combattants du petit bonheur, comme il l'explique à son ami journaliste Jean-Luc Delblat : « J'avais quelque chose en moi qui me poussait, d'une façon très obscure. Je voulais gagner ma vie en écrivant. Au coup par coup, bien sûr, j'avais des doutes. J'ai tout d'abord écrit un livre, qui a été refusé. C'est ce qui est devenu Les Combattants du petit bonheur »[13].

Dans un documentaire[14], il a confié que c'était ce premier manuscrit qui aurait retenu l'attention de Robert Poulet et de Michel Tournier, alors lecteurs chez Plon, mais que finalement c'est un autre manuscrit qui donna lieu à la publication de son premier roman (La Métamorphose des cloportes). Il dit devoir sa vocation d'écrivain à Albert Paraz[15]. Son éducation littéraire se fait lorsqu'il est commis dans une librairie d'ouvrages anciens, le Carillon des siècles, et dans les bibliothèques carcérales, notamment celle de la prison de Fresnes où il est employé[16].

« Quand j'étais en cellule, le soir, il y avait le couvre-feu. A six heures du soir il y a la soupe, et après fini! Il y a ce qui s'appelle la “fermeture”. L'électricité est coupée. Plus de lumière. En été, je pouvais travailler jusqu'au coucher du soleil, vers neuf, dix heures. Mais en hiver, c'était plus difficile. On se fabriquait des petites lampes, avec un fond de boîte de conserve ou de boîte de cirage. On y mettait de l'huile qu'on avait achetée à la cantine, puis une mèche en coton et on l'allumait... C'était comme la vieille lampe à huile de nos grand-mères. Ça présentait tout de même quelques difficultés, parce que si le maton était un sale con, il pouvait vous aligner et vous foutre un rapport. La sanction, c'était la privation de courrier, ou le mitard, éventuellement. »

— Alphonse Boudard[13]

Carrière littéraire

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À partir de trente-trois ans, Alphonse Boudard se consacre à l'écriture en utilisant une langue drue, nourrie de l'argot et du langage populaire. Baptisés « romans » parce qu'il éprouve une forte crainte de choquer les familles des personnages dont il évoque les agissements scabreux et de s'exposer à des procès, ses principaux ouvrages sont néanmoins fortement autobiographiques avec quelques recours à son imagination. Il évoque un Paris populaire des années 1940 à travers ses gangsters, proxénètes, maquerelles, escrocs, prêtres pervers, etc. Sous le nom de Laurent Savani, il écrit aussi un roman érotique, Les Grandes Ardeurs, publié en 1958, et qui lui vaut un supplément de prison.

« Quand j'écris un livre, je veux avant tout que le lecteur se marre. J'ai une lettre de Jean Anouilh qui me dit : "J'ai ri tout seul en lisant votre livre !". Ça, ça me fait plaisir ! Ce genre de littérature est mal vu, parce que la littérature, "Ça doit être grave". Eh bien, tant pis. La gaieté, c'est ce qu'il y a de plus important dans la vie. Vous pouvez raconter les pires histoires de cette façon… »

— Alphonse Boudard[13]

Il travaille pour le cinéma, écrivant notamment pour Jean Gabin quand celui-ci se brouille avec Michel Audiard, et pour la télévision, avec l'écriture et la présentation d'une série sur « Les Grands Criminels ». En 1967, il se voit confier l'écriture d'un film réunissant Jean Gabin et Louis de Funès et entreprend l'adaptation de sa nouvelle Gégène le tatoué mais, se heurtant aux différentes réclamations de modifications du scénario par les deux acteurs, il abandonne le projet, laissant le réalisateur Denys de La Patellière tourner Le Tatoué dans une situation fort inconfortable[N 1].

Au sein de la littérature française d'après-guerre, il s'inscrit dans cette famille d'écrivains au franc-parler où l'on rencontre René Fallet, Albert Simonin ou encore Antoine Blondin.

 
Tombe d'Alphonse Boudard au cimetière du Montparnasse (division 18).

Lors d'un interview en à Jean-Luc Delblat, Alphonse Boudard donne sa vision de la littérature contemporaine, avec un vocabulaire cru et haut en couleur : « Essayer de faire du cinéma… Parce que la galaxie Gutenberg va en prendre un coup dans les prochaines années ! Il n'y a plus beaucoup d'avenir dans la littérature… S'il veut "réussir", il n'a qu'à acheter un manuel du savoir-vivre et il trouvera ce qu'il lui faut! Il est important qu'il se construise une légende, qu'il se prenne au sérieux, qu'il écrive de façon assez obscure et qu'il soit susceptible d'intéresser les dames. Il faut aussi qu'il y ait un petit parfum sulfureux autour de lui, qu'il laisse entendre qu'il ait pu avoir une tendance à étrangler sa grand-mère, et ça marchera[13] ! ».

Il a compté Paul Chambrillon, « fin connaisseur de Céline, ami d'Arletty et de Raimu », parmi ses relations amicales[17].

En 1999, pour s'opposer à la guerre en Serbie il signe la pétition « Les Européens veulent la paix »[18], initiée par le collectif Non à la guerre[19].

Alphonse Boudard meurt le à Nice des suites d'un malaise cardiaque à l'âge de 74 ans. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse (division 18), à Paris.

Bibliographie

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Nouvelles

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  • 1982 : Les Enfants de chœur et autres nouvelles, Flammarion
  • 1996 : Outrage aux mœurs et autres nouvelles, Librio
  • 1997 : Revenir à Liancourt, Rocher

Écrits sur la criminalité et la prostitution

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  • 1986 : La Fermeture : 13 avril 1946, la fin des maisons closes, Robert Laffont, Prix Rabelais
  • 1988 : Patrick Fortier, Je me suis fait la belle, récit personnel raconté à Alphonse Boudard, Michel Lafon
  • 1989 : Les Grands Criminels, Le Pré aux Clercs
  • 1990 : L’Âge d’or des maisons closes, Albin Michel
  • 1992 : Faits divers et châtiments, Le Pré aux Clercs
  • 1997 : Quels romans que nos crimes, Rocher
  • 1998 : L'Étrange Monsieur Joseph, Robert Laffont
Biographie de Joseph Joanovici, célèbre trafiquant devenu milliardaire sous l’occupation allemande ; procès retentissant en 1949.

Écrits sur le langage

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Autobiographie

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Albums photos

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  • 1992 : Paris au petit bonheur (photos de Jean-Louis Courtinat), éd. du Perron
  • 1993 : Le Vin quotidien, recueil de photos, éd. Du May
  • 1993 : Bercy (photos de J.C. et Philippe Gautraud), Marval
  • 1994 : La Nuit de Paris (photos de Yves Manciet), Pierre Bordas
  • 1998 : La valse musette et l’accordéon : bals et guinguettes, en collaboration avec Marcel Azzola, Solar
  • 1998 : Des gens sans importance (photos de Jérôme Ducrot), Albin Michel.

Recueils

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  • 1991 : Chroniques de mauvaise compagnie, Presses de la Cité, préface de Frédéric Dard, regroupant quatre titres :
    • La Métamorphose des cloportes
    • La Cerise
    • L'Hôpital
    • Cinoche.
  • 1996 : Les vacances de la vie, Omnibus, regroupant cinq titres :
    • Les Combattants du petit bonheur
    • Bleubite
    • Le Corbillard de Jules
    • Le Café du pauvre
    • L'Éducation d’Alphonse.
  • 2011 : Les métamorphoses d'Alphonse, Robert Laffont, préface de Régine Deforges, regroupant trois titres :
    • Mourir d'enfance
    • L'Étrange Monsieur Joseph
    • La Fermeture.

Théâtre

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  • 1983 : Les Sales Mômes, Petit Marigny.
  • 1995 : Appelez-moi chef, Lansman, aussi connu sous le titre Cellule 118
  • 1996 : La Rue Alphonse Boudard, Poche Montparnasse

Filmographie

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Note : le commentaire indique le rôle d'Alphonse Boudard dans le travail sur film (adaptateur, dialoguiste...) ou simplement le type du film (documentaire, téléfilm, série télévisée...).

Cinéma

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Adaptation de ses œuvres
Scénariste / Réalisateur
Autres

À la télévision

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Fictions
Documentaires, émissions

Hommages

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En 2011, une de ses anciennes compagnes, l'écrivaine Laurence Jyl, lui consacre un livre[20].

Depuis 2013, une rue du 13e arrondissement de Paris, dans lequel il vécut une partie de son enfance, porte son nom[21],[22].

Notes et références

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  1. Étant toutefois crédité au générique du film, Alphonse Boudard contesta être l'auteur du scénario définitif, ainsi qu'il l'écrivit lui-même : « Je tiens à signaler aux lecteurs de Télé 7 jours que je ne suis pas le scénariste du film Le Tatoué. J'ai obtenu d'un tribunal que mon nom soit retiré du générique. Mon scénario initial ayant été totalement modifié par un nommé Pascal Jardin. » (lettre publiée dans la rubrique « Lettres des Téléspectateurs » de l'hebdomadaire Télé 7 jours no 732, semaine du 4 au , page 5).

Références

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  1. Marc Bonhomme, « Figures et construction d’une écriture argotico-populaire dans les romans d’Alphonse Boudard », Exercices de rhétorique [En ligne], no 7,‎ (DOI 10.4000/rhetorique.463, lire en ligne).
  2. « 1981 : Le langage, c'était mieux avant ? | Archive INA » (consulté le )
  3. Michèle Touret, Histoire de la littérature française du XXe siècle, Presses Universitaires de Rennes, , p. 183.
  4. André Nolat, Romances de la rue. Notes sur quatre écrivains : Mac Orlan, Carco, Simonin, Boudard, Baudelaire, , p. 191.
  5. Nicolas Ungemuth, « Alphonse Boudard, merde à celui qui lira ! », Le Figaro Magazine,‎ , p. 112-113 (lire en ligne).
  6. Alphonse Boudard raconte…, documentaire de Daniel Costelle, épisode 2, « La guerre », sur YouTube.
  7. François Broche, « Alphonse Boudard, ou… », sur magistro.fr, (consulté le ).
  8. Annie Coppermann, « La mort d'Alphonse Boudard, prince de l'argot », sur lesechos.fr, (consulté le ).
  9. François Bott, Mauvaises Fréquentations, Manya, , p. 17.
  10. Alphonse Boudard, La Fermeture : , la fin des maisons closes, robert laffont (réimpr. 1986), 345 p.
  11. Alphonse Boudard, Les Métamorphoses d'Alphonse, Robert Laffont, , p. 121.
  12. Télé 7 jours no 632, semaine du 3 au , pages 32 et 33, article de Michel Lis.
  13. a b c et d Jean-Luc Delblat, « Alphonse Boudard (1925-2000) - Entretien réalisé à Paris le  », sur delblat.free.fr (consulté le ).
  14. « Monsieur Alphonse raconte son 'Histoire de France" - 5 - "L'édition et le cinéma" Un film de Daniel Costelle proposé par Patrick Clémence » [vidéo], sur youtube.com, (consulté le ).
  15. « C'est grâce à Albert Paraz que je suis devenu écrivain. À travers notre correspondance il m'a incité à écrire », préface à l'édition Balland74 du Gala des vaches.
  16. Alphonse Boudard, Saint Frédo, Flammarion, , p. 131.
  17. « Le cahier bleu de Boudard », Marie-Béatrice Baudet, Le Monde, .
  18. « Liste des personnalités signataires de l'Appel », sur nonguerre.chez.com.
  19. Renaud Dély, « L'extrême droite ratisse large contre les frappes de l'Otan. Le «Collectif non à la guerre» a tenu une réunion proserbe hier soir », sur liberation.fr, .
  20. Laurence Jyl, Ce que je sais d'Alphonse, Paris, La Table Ronde, coll. « Vermillon », , 216 p. (ISBN 978-2-7103-6700-0).
  21. « La rue Alphonse Boudard », sur parisrues.com.
  22. « Délibération du Conseil de Paris », sur a06.apps.paris.fr.

Voir aussi

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Bibliographie

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Documentaire

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Vidéos

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• « La guerre », sur YouTube • « La délinquance », sur YouTube • « La prison et l'hôpital », sur YouTube • « L'édition et le cinéma », sur YouTube • « Les maisons closes », sur YouTube.

Liens externes

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