Dans le cours : Les fondements de la communication

Pratiquer le pace and lead

Dans le cours : Les fondements de la communication

Pratiquer le pace and lead

Milton Erickson, un psychiatre américain presque mythique, est connu pour n'avoir pas réellement eu de déroulé thérapeutique figé. Bien sûr, il avait un style, un certain nombre d'outils qu'il réutilisait, mais en premier lieu, il s'adaptait à son patient. Chaque nouveau patient était un nouveau cas et il pouvait agir de façon totalement différente selon le patient. Un de ses principes fondamentaux a été nommé Pace and lead, en français, on peut dire accompagner et guider. Ces principes peuvent être très utiles pour nous. Erickson part du fait qu'il faut prendre la personne dans la situation même, reconnaître cette situation, ratifier l'expérience, montrer par une formulation adaptée et intelligente qu'on comprend sa situation, pour pouvoir seulement après commencer à lui offrir des suggestions et lui amener peut-être de nouvelles informations. Une histoire d'Erickson et son fils illustre bien ces principes. Un jour, le fils de Milton Erickson, Robert, qui avait trois ans, a glissé dans les escaliers, s'est ouvert la lèvre et cassé un dent. Il était en larmes et le sang coulait sur la marche d'escaliers. Bien que ce fût une situation d'urgence, Milton Erickson ne l'a pas pris dans ses bras pour le consoler, il l'a laissé là où il était, et a profité d'un moment où l'enfant reprenait son souffle pour le dire d'un ton rapide et empathique : « Ça fait très mal Robert, ça fait horriblement mal ». Je vous cite les paroles de Milton Erickson racontant l'histoire. « À ce moment, sans aucun doute, mon fils savait que je savais de quoi je parlais. Il était d'accord avec moi, il pouvait être d'accord avec moi, et il savait que j'étais complètement d'accord avec lui. De ce fait, il pouvait m'écouter avec respect parce que j'avais démontré que je comprenais la situation complètement. Alors, j'ai dit à Robert : « Et ça va continuer à faire très mal ». Avec cette simple affirmation, j'ai nommé sa propre peur, confirmé son propre jugement de la situation, démontré ma compréhension de la situation complète et mon accord total avec lui, parce qu'à ce moment, tout ce qu'il pouvait considérer et prévoir, c'était seulement une éternité d'anxiété et de douleur pour lui-même. L'étape suivante pour lui et pour moi était de déclarer alors qu'il prenait une nouvelle respiration : « Et tu souhaites réellement que ça puisse s'arrêter de faire mal ». À nouveau, nous étions en complet accord. Son vœu était ratifié et même encouragé, et c'était bien son vœu, son vœu à lui qui venait entièrement de lui et de son propre besoin urgent. Puisque la situation était ainsi définie, je pouvais alors offrir une suggestion avec une certaine assurance de son acceptation, et cette suggestion était : « Et peut-être que cela va s'arrêter de faire mal dans un moment, dans peut-être une minute ou deux ». C'était une suggestion en complet accord avec ses propres besoins et son propre vœu, et parce qu'elle était qualifiée par un « peut-être, cela va... », ce n'était pas en contradiction avec sa propre compréhension de la situation. Alors, seulement il pouvait accepter l'idée et commencer à répondre à cette idée ». Fin de citation. C'est un principe fondamental de la communication. Vous ne pouvez pas imposer vos idées ou forcer l'acceptation de quelque chose sans avoir d'abord rencontré votre interlocuteur. Par rencontrer, je veux dire établir le dialogue, créer le lien, la confiance. D'abord, il faut accompagner, se mettre au rythme de l'autre, entrer dans son monde, en faire partie, l'écouter, le comprendre, pour à la fois créer la confiance, mais aussi pour savoir comment lui parler, quels mots employer, quels types d'arguments vont être efficaces, c'est uniquement lorsque c'est fait, lorsque vous savez que c'est fait, que vous pouvez aller plus loin et commencer à guider. Communiquer vos idées, poursuivre votre objectif en utilisant le langage et le monde de votre interlocuteur. Vous pouvez appeler ça une forme de manipulation, mais vous pouvez appeler ça aussi une forme de respect. S'adapter à l'autre, l'écouter, le comprendre étant en soi une démarche vertueuse. Sans cela, vous initiez un dialogue de sourds.

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