Chapter Text
Cela faisait maintenant plusieurs heures que Bernadetta attendait, assise contre la porte de sa chambre, toute recroquevillée sur elle-même. Ce qu’elle attendait, c’était que le sommeil l’emporte. Cependant la jeune fille était bien trop tendue pour s’endormir. De plus, elle avait le ventre vide, pas qu’elle n’aimait pas manger, au contraire, elle appréciait partager un repas avec ses amies Dorothea, Petra et Ingrid. Seulement ce soir-là, la cantine était bondée et aux vues de tous ces gabarits effrayants, Bernadetta avait pris la fuite, rapide comme une flèche.
Elle était contente que ses amies ne soient pas venues la faire sortir de force de sa chambre, mais à la place elles avaient envoyé le professeur Byleth. Cela était encore pire pour la fille aux cheveux violets car son professeur était la seule qui parvenait à la faire sortir de son cocon de tranquillité, si l’on excluait Ingrid qui défonçait la porte pour rentrer. Byleth avait donc tenté de raisonner son élève, tout d’abord calmement, elle lui expliquait que l’alimentation était importante, que ce soit pour le combat ou encore son organisme. Seulement, plus la discussion avançait et plus Byleth perdait patiente devant la réticence de la jeune fille. « Vous ne pouvez pas vous baladez en pleine nuit au réfectoire pour manger. Je respecte totalement le fait que vous ne soyez pas à l’aise avec la foule mais cela ne vous donne pas le droit de transgresser le règlement ! » avait-elle finit par dire d’un ton assez glacial qui figea Bernadetta en imaginant le visage dur que son professeur pouvait faire de l’autre côté de la porte.
La jeune femme aux cheveux bleus avait décrété que la discussion était allée assez loin pour ce soir et qu’elle allait la laisser tranquille. Byleth avait cependant obligé Bernadetta à se rendre au réfectoire le lendemain matin. « Si vous n’y êtes pas sachez que je viendrai vous chercher personnellement et gare à vous si j’apprends que vous êtes allée vous balader cette nuit » avait-elle déclarée d’une voix forte avant de lui souhaiter une bonne nuit et de partir.
Bernadetta n’avait aucune envie de sortir par peur de ce que pourrait faire Byleth si elle apprenait pour son escapade nocturne. Cependant son estomac produisait des grognements de plus en plus bruyants et elle commençait à réellement souffrir du manque de nourriture. « Si j’avais su que le réfectoire serait plein ce soir, je serais quand même aller manger ce midi, malgré le fait que Dorothea soit accompagné par plein d’inconnus… » songea-t-elle.
Après un long débat interne, ce fut la faim qui l’emporta. Elle entrouvrit donc la porte : personne en vue. La jeune fille sortit silencieusement et traversa le monastère en évitant les quelques personnes qui surveillaient les couloirs. Bernadetta ne vit pas Byleth parmi eux. Le fait que son professeur ait trouvé mieux à faire que la surveiller la rassurait quelque peu.
Elle atteint finalement le réfectoire sans encombre. Totalement vide et plongé dans le noir absolu, elle manqua plusieurs fois de chuter à cause d’obstacles imprévus. Au bout de quelques minutes, la lumière de la lune éclaira un peu la pièce, permettant à Bernadetta de se repérer. La jeune fille aux cheveux violets arriva devant les portes du garde-manger et fouilla un peu dans ce dernier. Elle trouva un peu de pain avec de la confiture, prit un couteau qu’elle trouva dans un tiroir et se prépara quelques tartines, assise sous le comptoir côté cuisine pour avoir le temps de déguerpir si un professeur arrivait. Elle profitait pleinement de ce repas qui lui permettrait de survivre jusqu’au lendemain matin quand elle entendit un bruit, celui de la porte. Elle ne risquait rien car les professeurs ne faisaient que traverser le bâtiment, il ne risquait donc pas de la voir vu son emplacement. Cependant les pas se rapprochèrent d’elle, comme si on savait qu’elle était là. Une immense silhouette passa juste devant elle et s’arrêta devant la porte du garde-manger. La lune n’éclairait que très peu l’obscurité et la jeune fille ne put savoir de qui il s’agissait. Bernadetta tenta alors de filer tandis que cette personne lui tournait le dos, mais le couteau cogna légèrement les dalles qui recouvraient le sol, provoquant un petit tintement.
L’inconnu se retourna et planta son regard doré dans celui de la jeune fille. Effrayée, elle ne put contenir un hurlement strident. L’inconnu réagit au quart de tour et plaqua sa main contre la bouche de la violette, empêchant son cri de sortir et d’alarmer les professeurs.
- Chut ! souffla-t-il aussi doucement que le pouvait sa voix retentissante. Si tu cries on va se faire prendre !
Bernadetta put, grâce au rapprochement effectué, reconnaître Raphael. Elle ne le connaissait que de loin pour être un élève des Cerfs d’or à la voix forte et qui attirait beaucoup l’attention sur lui. Il était également très imposant physiquement, à cause de sa très grande taille et de sa musculature très marquée, et pour toutes ces raisons il faisait partie des personnes effrayant le plus Bernadetta. Raphael finit par retirer son immense main du visage de la jeune fille.
- Aah ! Vous m’avez fait peur, chuchota-t-elle. J’ai cru que vous vouliez m’étouffer pour me tuer !
A défaut de pouvoir exploser de rire, le blond se contenta du rire le plus discret qu’il pouvait lâcher.
- Je n’avais pas l’intention de vous tuer mais seulement de manger !
- Hiiii ! Vous vous vouliez me manger ?! couina la jeune fille.
- Non pas vous mais dans le garde-manger, s’exclama le jeune homme toujours en chuchotant. Ils n’ont pas voulu me donner une deuxième portion au dîner et comme je me suis bien dépensé aujourd’hui, j’avais absolument besoins de manger plus ! Je ne m’attendais juste pas à tomber sur vous. D’ailleurs qu’est-ce que vous faites assise par terre sous le comptoir ?
- Je me cache pour que si un professeur passe, il ne me voit pas.
- Vous pouvez vous asseoir à table personne ne passe au réfectoire à cette heure-ci, enfin à part moi ! dit-il tout fière.
Au début Bernadetta ne voulait pas l’écouter et restait cachée, mais à force de persuasion et de promesse, Raphael finit par la convaincre de venir s’assoir à table pour être installée plus confortablement que par terre.
Elle avait fini de manger depuis bien longtemps mais étonnamment, elle restait avec lui, le regardant manger et écouter ce qu’il disait entre deux bouchées. La violette ne saurait dire pourquoi mais il l’effrayait moins, juste un peu, mais c’était déjà ça. « Ce doit-être parce qu’il chuchote, du coup il n’utilise pas sa grosse voix qui résonne » pensa la jeune fille.
- Je vais aller prendre un peu de viande, déclara Raphael.
- Ah non vous ne pouvez pas ! chuchota Bernadetta.
- Pourquoi ? demanda-t-il surpris par les sourcils froncés de la violette.
- Parce qu’il faut laisser de la nourriture pour les autres et vu comment c’est parti vous n’allez pas en laisser une miette ! rétorqua-t-elle.
- Mais la viande c’est mon carburant, râla le blond dont la voix se faisait de plus en plus forte.
- Chut ! souffla Bernadetta. Ne criez pas sinon les professeurs vont nous entendre.
- Mais c’est à cause de vous que je crie ! Si je mange c’est pour avaler de quoi me nourrir, en somme de la viande.
La voix de Raphael résonnait désormais dans tous le réfectoire, et quelques secondes plus tard, une lumière de chandelle apparut par l’ouverture du hall des chevaliers et des pas se rapprochaient.
« Byleth ! Ou du moins un professeur » s’alarma Bernadetta. Hors de question qu’elle se fasse prendre et de subir la punition promise par celle aux cheveux bleus.
Avec la vitesse de l’éclair, elle attrapa le bras de Raphael et elle courut le plus vite possible hors du réfectoire par la porte de derrière. Les deux élèves entendirent une voix leur ordonner de s’arrêter, elle semblait appartenir à Seteth mais Bernadetta ne préféra pas s’arrêter pour vérifier, car si elle appartenait bien à Seteth, il fallait absolument s’enfuir. Les deux élèves passèrent devant l’étang et se cachèrent derrière un buisson, à côté de la serre. Seteth passa sans les apercevoir, les adolescents attendirent quelques minutes avant de briser le silence.
Ce fut Bernadetta qui le brisa :
- Idiot ! On aurait pu se faire prendre à cause de toi ! dit-elle en donnant des petits coups de poings dans le bras du blond qui explosa de rire.
- On se tutoie maintenant ? demanda-t-il avec un sourire narquois.
- Là n’est pas la question ! le rouge lui monta aux joues. Si je m’étais fait prendre, le professeur Byleth m’aurait tuée !
- Comment ça ? Elle est plutôt sympa.
- Elle m’avait fait promettre de ne pas sortir ce soir en me menaçant mais j’avais tellement faim que je ne pouvais pas rester dans ma chambre ! s’exclama Bernadetta.
- Ah je te comprends ! soupira le blond. Impossible de dormir le ventre vide.
Raphael se leva et la jeune fille l’imita. Le garçon reprit :
- Je suis content que tu sois venu au réfectoire !
- Ah bon ? demanda la jeune fille étonnée.
- Bah oui, répondit-il tout content. À chaque fois que je te vois tu t’enfuis donc aujourd’hui était enfin l’occasion de te parler.
- Ce n’est pas ma faute si tu es si effrayant, murmura-t-elle.
- Qu’est-ce que tu as dit ? demanda Raphael qui n’avait pas entendu.
- R-rien !
Il y eut un silence pendant quelques instants, jusqu’à ce que les deux adolescents se rendirent compte que Bernadetta tenait toujours la main du blond. Une teinte rouge apparut sur les joues de la violette qui lâcha subitement Raphael.
- Heum… on devrait peut-être retourner dans les dortoirs… déclara le plus grand des deux, quelque peu gêné.
Le duo se dirigea donc vers les chambres jusqu’à ce qu’ils se retrouvèrent nez à nez avec un autre élève.
- Qu’est-ce que vous faites tous les deux ?
- Salut Dimitri ! déclara Raphael. On faisait un tour c’est tout !
- Et vous avez une autorisation ? demanda le prince.
Le sourire gêné du plus grand et le regard fuyant de la violette répondirent d’eux même à la question de Dimitri, qui lâcha un soupir.
- Vous savez que Seteth vous cherche… Mais bon comme il ne vous a pas vu, je ne dirai rien pour cette fois. Cependant, par pitié, ne vous mettez plus dans de pareilles situations.
Bernadetta et Raphael partirent en remerciant Dimitri, sans oser lui demander ce qu’il faisait à trainer en pleine nuit dans le monastère.
Il fut l’heure de se séparer lorsqu’ils arrivèrent devant la chambre de la jeune fille.
- Ma chambre est plus loin par-là, déclara Raphael en montrant une direction à l’aide de son indexe. Si jamais il te reprend l’envie de faire une balade nocturne au réfectoire, fait moi signe.
La violette acquiesça avant de le saluer.
- Bonne nuit Raphael.
La voix de Bernadetta était bien plus douce que d’habitude, surtout avec quelqu’un qui l’effrayait et qu’elle ne connaissait que très peu, ce qui surprit grandement Raphael qui ne lui connaissait pas cette tendresse. Cependant, à cause de l’obscurité, la jeune fille ne put remarquer cela.
- Bonne nuit Beradetta, dit-il tout sourire.
Bernadetta referma la porte de sa chambre tandis que Raphael se dirigeait vers la sienne.
Cette soirée avait été mouvementée pour la jeune fille qui, d’ordinaire, restait cloitrée dans sa chambre. Raphael l’effrayait toujours autant mais une chose était sûre, elle n’avait pas totalement détesté rester avec lui.