Projet:Observatoire des IA/Aksidan

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Charlotte Sylvanie Mola dite Aksidan est une artiste musicale originaire de la Guadeloupe. Elle est spécialisée dans le chant Bélè Kabolo. Elle représente un monument pour la culture du Gwoka. [1]

Aksidan
Nom de naissance Charlotte Sylvanie MOLA
Alias
Aksi
Naissance
Modèle:Gourbeyre (Drapeau de la France France)
Décès (à 85 ans)
Drapeau de la Guadeloupe Guadeloupe (Drapeau de la France France)
Nationalité Modèle:France/Française
Pays de résidence Guadeloupe
Distinctions
Fresque patrimoniale à Bas du bourg

Historique

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Contexte historique

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 Elle a vécu dans un cadre historique complexe, celui de la Guadeloupe des années 1980, une période marquée par des tensions politiques, économiques et sociales. Ce cadre est celui d'un territoire, qui bien que département français depuis 1946, se trouve en proie à des revendications identitaires et autonomistes croissantes. Ces revendications sont portées par des mouvements politiques comme l’Union Populaire pour la Libération de la Guadeloupe (UPLG) et d’autres groupes, qui critiquent la gestion économique et politique de l’île par la France hexagonale, perçue comme néocoloniale. Parallèlement, la population guadeloupéenne vit un sentiment de marginalisation face aux décisions prises depuis Paris, et aspire à une plus grande autonomie ou même à l'indépendance.

Les tensions sociales sont exacerbées par une profonde inégalité économique. L'économie de l’île, encore largement dominée par les plantations de canne à sucre et de bananes, est en déclin, affectée par les fluctuations des prix internationaux et la concurrence mondiale. Ce déclin entraîne une montée du chômage, aggravée par la faible diversification économique. Les jeunes en particulier sont touchés par le manque de perspectives, ce qui alimente le malaise social. La population se mobilise à travers des grèves et des manifestations, notamment celles de 1985, qui témoignent de la frustration croissante face à une économie en difficulté et des conditions de vie précaires.

En parallèle, la dépendance économique de la Guadeloupe vis-à-vis de la France est un facteur clé des évolutions de cette époque. La survie de l’économie locale repose en grande partie sur les subventions et aides financières métropolitaines. Ce modèle de développement, centré sur les transferts de fonds publics, entretient une dépendance qui, tout en assurant une forme de stabilité, est perçue par une partie de la population comme un frein à une véritable autonomie économique. Le tourisme commence à émerger comme un secteur potentiel de diversification, mais il reste limité et profite essentiellement aux investisseurs extérieurs, accentuant le sentiment d'exploitation locale.

Enfin, cette décennie est aussi marquée par l’émigration importante des Guadeloupéens vers la France métropolitaine, à la recherche de meilleures opportunités économiques. Ce phénomène, encouragé par des programmes comme le BUMIDOM, vide l’île de sa jeunesse et renforce un cycle de dépendance à l’égard de la métropole, puisque les transferts économiques de cette population expatriée deviennent essentiels à l'économie locale.

Sur le plan environnemental, la Guadeloupe doit également faire face à des catastrophes naturelles, notamment des cyclones, qui détruisent une partie de l’agriculture et aggravent les difficultés économiques. Ces événements mettent en lumière la vulnérabilité de l’île face aux aléas climatiques et renforcent la nécessité des aides d’urgence provenant de la France.

Ainsi, elle a vécu dans un cadre marqué par une lutte continue entre l'affirmation de l'identité guadeloupéenne et la dépendance à la France hexagonale, dans un contexte d’inégalités sociales croissantes, de stagnation économique et de pressions autonomistes. Les évolutions politiques, économiques et sociales de cette époque sont autant de facteurs qui ont façonné la réalité quotidienne des Guadeloupéens, dans une quête perpétuelle de dignité, de justice sociale et d’autonomie politique.[2]

Biographie

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Son surnom d’« Aksidan » provient de son travail acharné dans des métiers traditionnellement réservés aux hommes, comme celui d’éboueur ou de charbonnière. Suite à un récit anecdotique impliquant des matelots qui naviguant sur une Jeanne, dont elle avait sucité la curiosité car tous les matins a deux heures ils la voyaient travaillant dur dans les rues de Basse-Terre. Un jour ils l'accostent et se rendent compte que c'est une femme. Un des étrangers s'exclame donc "Mais ce n'est pas une femme mais un accident" depuis elle garda le surnom. Elle a ainsi brisé les normes et stéréotypes de genre qui limitaient les femmes à des rôles précis, montrant qu'elles peuvent occuper n'importe quel type de fonction, même celles perçues comme physiquement ardues ou masculines. Cela reste une leçon importante dans un monde où les femmes luttent encore pour l'égalité salariale et l’accès aux mêmes opportunités professionnelles que les hommes.[3]

"An fè charbon, an travay la tè, an monté asi cha, an baléyé lari, pilé zodi èvè pyé an mwen" dit par Aksidan

Charlotte Sylvanie Mola, surnommée Aksidan, a vécu dans un cadre historique marqué par les évolutions politiques, économiques et sociales de la Guadeloupe. Née en 1922, elle a grandi dans un contexte de colonisation française et a traversé des périodes de transition majeures pour l’île, notamment les décennies suivantes la départementalisation de 1946. Son parcours personnel a été façonné par les conditions de vie précaires des Guadeloupéens, en particulier ceux vivant dans les zones rurales et urbaines pauvres.

Pendant ses premières années à Basse-Terre, elle a connu les difficultés d'une vie marquée par la pauvreté, se retrouvant obligée de déménager seule avec ses 6 enfants et de s’installer dans une modeste case « anba simityè-la ». Pour subvenir aux besoins de sa famille et élever ses 11 enfants, Aksidan n’a reculé devant aucun travail, allant des tâches agricoles à celles plus éprouvantes physiquement comme balayer les rues ou participer à des travaux d'hommes. Son quotidien reflète la réalité de nombreux Guadeloupéens à cette époque, confrontés à des inégalités sociales et économiques profondes, notamment dans un contexte où les activités agricoles étaient en déclin, et où les opportunités de travail manquaient souvent.

"Aksidan ka voyagé" ! Le 23 février 2007, Charlotte Sylvanie Mola est décédée. La Guadeloupe a rendu hommage à cette grande femme lors de ses funérailles à Basse-Terre. Elle a été portée au cimetière du Chef-lieu en présence de plusieurs milliers de personnes, parmi lesquelles on retrouve sa famille et des personnalités de la culture locale ainsi que ses admirateurs. Tant de personnes sont venus a son enterrement que l'église était trop étroite pour accueillir la foule.

Entrée dans Voukoum

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Elle connait le groupe Voukoum grâce à Pierre Serin surnommé "Ti-Piè", qui lui même était un musiciens de Voukoum. Après plusieurs apparitions dans les rassemblement du groupe, elle s'est épris d'amour pour la musique et l'ambiance du collectif. Aksidan n'a donc après ça jamais quitté le groupe et en est même devenue la tête d'affiche.

Carrière musicale

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Aksidan est considérée comme une figure emblématique grâce à sa trace artistique et son talent hors du commun. Sa voix atypique et ses paroles mêlant son quotidien, ses épreuves et la sonorité culturelle a suscité l'enthousiaste du public, attirant les foules et collaborations diverses tel que Max Thélèphe, Voukoum. Le Bèlè Kabolo était son domaine, c'est un type de chant basé sur l'improvisation de moeurs et actions quotidienne. Le Kabolo est un termes spécifique à la Basse-Terre désignant ces même chant réalisés dans des Lolo[4] antillais, par les joueurs de domino.

La carrière d’Aksidan est marquée par la sortie de son album "Lokans et Répriz" à 77 ans. Il y a 25 ans en 1999. Sa participation active aux défilés de carnaval jusqu’à près de 80 ans, met en lumière l’importance du leadership féminin à tous les âges sur des rythmes de Bèlè, Gwosiwo, Toumblak, accompagné par VOUKOUM - Mouvman Kiltirel Gwadloup dont elle est devenue une fervente adepte pour les déboulés carnavalesques et les l'ambiance chargée en énergie.

À une époque où le vieillissement des femmes est parfois perçu comme une diminution de leur importance sociale, Aksidan incarne une autre réalité : celle où l’âge apporte une richesse d’expérience et une sagesse inestimable, ouvrant encore la voie à de nouvelles réalisations.

  • Oeuvres publiées en 1999:
  1. "Pwan telefon",
  2. "Zaza"
  3. "An di manman pa maré mwen"
  4. "Mwen pa mayé mwen divosé"
  5. "Ti anmo"
  6. "Say vlé vwé vou"
  7. "Chawlot"
  8. "Letisya"
  9. "Magalie-o"

Son travail et celui de son groupe lui a valu une portée dépassant les eaux de son île d'origine. Grâce a elle Aksidan à voyager et effectuer des tournée tel que celles ci :

En tant que femme

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Le parcours d’Aksidan s'inscrit également dans une époque où les femmes, surtout celles issues de milieux modestes, avaient peu de possibilités de se faire connaître ou de promouvoir leur talent à grande échelle. À son époque, les femmes étaient souvent reléguées à des rôles domestiques ou marginaux, surtout dans des sociétés postcoloniales comme celle de la Guadeloupe, marquées par des inégalités économiques et sociales profondes. Aksidan, bien qu’ayant défié les normes de genre en exerçant des métiers traditionnellement masculins et en devenant une figure de la culture Bèlè, a dû faire face aux limites imposées par ces inégalités structurelles. La reconnaissance des femmes dans le domaine artistique ou culturel était souvent retardée ou ignorée, particulièrement pour celles issues des classes populaires. Ce parcours nous rappelle l'importance de la résilience et de la capacité à s'adapter face à l'adversité, des valeurs toujours d'actualité, surtout pour les femmes confrontées à des réalités difficiles comme la précarité économique, les discriminations, ou les inégalités sociales.

Aksidan a consacré une grande partie de sa vie à lutter pour la survie de sa famille. Élevant seule 11 enfants dans des conditions difficiles, elle a dû exercer divers métiers pour subvenir à leurs besoins. Cette situation de précarité économique et sociale l’a probablement empêchée de se consacrer pleinement à la promotion de son talent ou à une carrière artistique formelle plus tôt dans sa vie. Ce n'est qu'à un âge avancé, lorsqu'elle rejoint le groupe Voukoum et sort son album « Lokans é Répriz » à 77 ans, qu’elle a pu commencer à partager son art de manière plus visible. Le fait qu'elle ait connu la célébrité tardivement a sans doute limité l’ampleur de sa reconnaissance. Beaucoup de figures artistiques et culturelles bâtissent leur notoriété au fil de longues années de carrière, ce qui leur permet d’acquérir une visibilité plus large.

Une femme pleine de courage, qui avait pour idéologie que il n'existait pas de chose qu'une femme ne pouvait accomplir avec de la motivation et de l'ambition. Selon elle évoluer dans un environnement strictement féminin se résumait à être une "machine a kankan", en clair strictement enclin à provoqué de la médisance et des commérages. Une mentalité qui reflète et évolue avec son époque ou selon l'opinion publique les femmes était porteuses des problèmes. On peut aussi qualifier cette femme de femme "Potomitan" mais elle n'était pas que ça, elle est un monument et représente une avancer pour la culture. Elle est connue pour la générosité dans ses actes et son sens du partage, comme quand elle voyageait elle distribuait de la nourriture et aimait offrir a ceux qui l'entourait.

Hommages

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Le peuple guadeloupéen n'a jamais cessé de lui rendre hommage. En effet, on retrouve chaque année un hommage le jour de sa mort le 27 février animé par les membres de Voukoum ainsi que ses admirateurs. De plus, le jour de sa naissance est aussi commémoré, afin d'honoré sa mémoire une fresque a été réalisée, à Bas du Bourg en Basse-Terre. De plus des Kabolo sont exécutés en son honneur. [5]

Morales

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Le parcours d'Aksidan reflète la manière dont les luttes des femmes sont souvent indissociables des luttes sociales plus larges. Son engagement dans la culture Bèlè, son association avec le mouvement Voukoum, et son expérience de mère de famille nombreuse confrontée à des conditions économiques difficiles montrent comment les femmes doivent souvent jongler entre les luttes pour leurs droits individuels et les combats pour la justice sociale, la dignité et l'égalité dans leurs communautés. Aujourd’hui, cette interconnexion est toujours d'actualité. Les défis contemporains tels que la justice économique, l'égalité de genre et la reconnaissance des droits des femmes dans des contextes de précarité sociale trouvent écho dans le parcours d'Aksidan. Elle nous enseigne que la lutte pour les droits des femmes est une lutte collective, liée à des enjeux plus larges de justice sociale.

Aksidan a joué un rôle essentiel dans la préservation et la promotion de la musique Bèlè, une forme d’art qui puise dans les traditions culturelles de la Guadeloupe, tout en étant un vecteur d'expression populaire. À travers ses chants et ses improvisations, elle a mis en lumière les réalités sociales de la Guadeloupe, y compris les relations de voisinage, les faits divers et les luttes quotidiennes. Cette capacité à utiliser une forme artistique pour défendre des causes et faire entendre une voix féminine est un puissant exemple d’autonomisation à travers la culture.

Aujourd’hui, l’art et la culture continuent d’être des outils puissants pour les femmes dans leur quête d’émancipation. En s'inspirant d'Aksidan, les artistes, militantes et citoyennes peuvent voir comment l'expression artistique permet de défier les normes, de parler des luttes personnelles et sociales, et de se forger une identité forte face à l'adversité.

Le parcours de Charlotte Sylvanie Mola, alias Aksidan, nous inspire par son courage, sa résilience et sa capacité à transcender les stéréotypes et les limites imposées aux femmes. Elle incarne une figure de résistance face à l’adversité, tout en montrant l’importance de l’expression culturelle comme outil d’émancipation. Son histoire est un rappel que, même dans les conditions les plus difficiles, il est possible de défier les conventions et de tracer sa propre voie.

  1. « Aksidan, Maître Ka », sur Vivez le Gwoka avec l'Institut GWOKA Gran Jan Bèl (consulté le )
  2. Christian Deverre, « Crise sucrière et réforme foncière en Guadeloupe. Les structures agraires face au changement économique et social », Revue d’Études en Agriculture et Environnement, vol. 17, no 1,‎ , p. 97–120 (DOI 10.3406/reae.1990.1243, lire en ligne, consulté le )
  3. « Charlotte Sylvanie MOLA dite AKSIDAN - Outremer Memory », (consulté le )
  4. « Le lolo, un pan du patrimoine économique et de la mémoire collective de Guadeloupe », sur Archives Départementales de la Guadeloupe, (consulté le )
  5. André-Jean VIDAL, « Guadeloupe. Basse-Terre rend hommage à Aksidan », sur KARIBINFO, (consulté le )